Comme le dit Antoine Robitaille, avec le titre de son article dans Le Devoir, Marc Bellemare a lancé sa bombe. Cela fait des semaines que les lèvres lui tremblent, lui qui n’en finissait plus de retenir ses allégations, à propos de Jean Charest, et des libéraux, avec lesquels il fut ministre de la justice, pour un court séjour, soit de 2003 à 2004. On se souviendra d’ailleurs de sa démission fracassante.
Loin de moi l’idée de blanchir qui que ce soit, autant d’un côté que de l’autre, dans cette affaire. Mais celle-ci me fait drôlement penser à une autre affaire, dans laquelle un politicien municipal influent disait détenir des informations privilégiées sur des échanges d’enveloppes brunes. Vous vous souvenez de la dernière campagne électorale municipale, à Montréal, n’est-ce pas? Ce cher Benoît Labonté, qui était au courant de tant de choses, a fini par se faire prendre à son propre piège, et a finalement dû reconnaître qu’il avait lui-même reçu des enveloppes brunes.
Or, plus je regarde aller l’affaire entourant les propos de Marc Bellemare, plus je vois des ressemblances avec celle de Benoît Labonté. Celui-ci choisissait ses tribunes, Bellemare aussi; il ne veut pas s’avancer devant le Directeur général des élections du Québec (DGEQ), disant que celui-ci, au moment où il fut contacté, “agissait comme un homme de main du premier ministre”, rien de moins. Imaginez Maurice « Mom » Boucher, en train de choisir quelle cour devra entendre son procès; ça ne fait pas de sens. Alors pourquoi Marc Bellemare aurait-il le pouvoir de choisir l’endroit où il ira raconter les détails de ce qu’il sait? Si c’est au DGEQ à enquêter sur les cas de financement politique illégal, Bellemare doit témoigner devant le DGEQ, point. Labonté aimait bien les journalistes, Bellemare aussi; à date, selon l’article de Robitaille, l’ancien ministre de la justice a accordé des entrevues à Radio-Canada, et à TVA, en plus d’avoir “rencontré de façon fortuite (…) hier matin dans le train Québec-Montréal” un représentant du Devoir, à qui il a également parlé. Ce quotidien, qui se dit libre de pensée, rencontre-t-il souvent les gens qui font sa une de façon fortuite? Ce simple détail est suffisant pour soulever des doutes, dans mon esprit.
Quand Marc Bellemare fut recruté par Jean Charest, en vue des élections générales de 2003, il voulait un fauteuil de ministre, au minimum, et avait un agenda bien personnel. Comme celui-ci ne concordait pas tout à fait avec celui du premier ministre, Marc Bellemare a claqué la porte avec grand fracas. Selon moi, l’ancien ministre se rend bien compte que pour faire changer les choses dans le sens qu’il souhaitait, il aurait dû prendre son mal en patience, et demeurer au gouvernement. Or, de la façon dont il s’y est pris pour en sortir, il était définitivement exclu que Bellemare y retourne; peut-être a-t-il parlé à Jean Charest, et s’est-il rendu compte que la porte lui était désormais fermée. Maintenant qu’il constate qu’il est dans un cul-de-sac, il veut mettre ses anciens commettants dans des eaux troubles. Et toujours selon moi, il risque de se faire prendre à son propre piège. Comme Benoît Labonté.
Et la vérité, elle se trouve où, dans tout cela? Le temps va bien finir par nous le faire savoir…