Beau petit clip vidéo, ce matin, gracieuseté de TVA, d’une station de pesée de camions lourds, à Saint-Bernard-de-Lacolle, à deux kilomètres de la frontière Québec-New York, qui a été construite sur des sols instables. Essayons de reconstituer l’affaire.
En janvier 2005, le MTQ est allé de l’avant avec la construction d’un poste de contrôle routier « modèle », composante d’un grand investissement conjoint entre l’état de New York et la province de Québec afin d’améliorer la sécurité à la frontière, tout en assurant une meilleure fluidité des personnes et des marchandises. La municipalité de Saint-Bernard-de-Lacolle, mise au parfum des intentions du MTQ, a avisé celui-ci que les sols, à cet endroit, étaient beaucoup trop instables pour faire ce type de construction. Évidemment, le MTQ a fait ce qu’il a voulu, et a construit quand même le poste. La construction a duré dix-huit mois, et fut interrompue à plusieurs reprises par d’innombrables imprévus. À l’automne de 2006, la station de contrôle routier reçoit donc ses premiers camions lourds à être pesés, et ce qui devait arriver arriva. La chaussée de la station s’est affaissée de plusieurs centimètres, causant d’importants dommages à tout le système de pesée, qui est maintenant inutilisable.
Encore une fois, on a affaire à un cas de fonctionnaires qui font ce qu’ils veulent. Il aurait été beaucoup plus simple de prendre en compte l’avis de la municipalité, et de prendre des mesures en conséquence dès la mise en chantier du poste. L’autoroute 15 passe à quelques mètres de là, et elle ne s’affaisse pas; il doit bien y avoir une façon de construire sur de tels sols qui n’a manifestement pas été suivie dans le cas de la station de pesée.
Cela me fait penser au pont couvert de Notre-Dame-des-Pins, en Beauce. Un site web y est d’ailleurs dédié. Ouvert à la circulation en 1927, ce pont intimide un peu les gens de la place, parce qu’ils ont peur que celui-ci soit emporté par les glaces de la rivière Chaudière, qui partent en débâcle à chaque printemps. Le maire de la municipalité, à l’époque, tente de convaincre l’ingénieur en chef que le pont n’est pas assez haut, par rapport au niveau de la rivière, ce à quoi il répondit que « des criques comme la Chaudière, il en avait vu d’autres ». Prévoyant, le maire a toutefois réussi à faire signer une entente en vertu de laquelle le département de la colonisation devrait payer entièrement un nouveau pont si celui-ci était emporté par les glaces. C’est le matin de Pâques de 1928 que les citoyens de Notre-Dame-de-la-Providence, c’était le nom de la paroisse, ont prononcé ma phrase fétiche, « ce qui devait arriver arriva ». Ce matin-là, plus précisément le 8 avril 1928, les paroissiens du côté ouest n’ont pas pu assister à la messe dominicale parce qu’au cours de la nuit, le pont couvert, encore tout neuf, fut éventré par les glaces de la rivière, et des sections se sont retrouvé un peu partout entre la municipalité et la voisine, Beauceville. D’ailleurs, une importante partie du pont couvert s’est échouée contre le pont de cette autre municipalité. Il aura donc fallu reconstruire un nouveau pont, plus haut de quatre pieds que le précédent, qui fut construit sur des piliers de béton, et non pas sur des piles de roches, comme le précédent, et entièrement payé par le ministère de la colonisation. La construction de ce nouveau pont couvert a débuté à l’été de 1928, et il fut ouvert à la circulation en septembre 1929. Beaux joueurs, les élus municipaux ont adopté une motion de remerciements, notamment envers le ministre de la colonisation, un certain monsieur Perreault, dont le pont porte depuis le nom.
Et dans le cas actuel, donnera-t-on un nom à ce poste de pesée, si celui-ci est reconstruit? J’imagine déjà « la station de contrôle routier Julie-Boulet ».
Le ministere des transport a vraiment un probleme.
Remarque que a leur place ont aurait peut etre le meme probleme. L’argent il y en a, c’est pas le probleme.
Lorsque je parle du gouvernement, je dis toujours 2 choses :
– Pourquoi faire simple quand on peut faire complique ?
– Pourquoi faire de la qualite du premier coup, quand on peut faire de la scrap, et la refaire quelques annees plus tard, et ainsi pouvoir graisser la pate deux fois ?
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Je me relis la. Je ne suis pas clair. Concernant l’argent, je veux dire que le ministere n’a aucune preoccupation monetaire, le prix n’est pas important.
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Je vais m’empresser d’appuyer tes commentaires, mon cher Stephan S, en prenant ceux de Nathalie Elgrably, extraits de sa dernière chronique hebdomadaire publiée dans le Journal de Montréal. Ça va comme ceci:
« De nombreux auteurs ont tenté d’expliquer l’inefficacité de l’État, mais personne n’a été aussi clair, concis et éloquent que l’a été Milton Friedman, récipiendaire du prix Nobel d’économie de 1976 et l’un des économistes les plus influents du 20e siècle.
Friedman identifie quatre façons de dépenser l’argent:
(1) dépenser son propre argent pour soi-même, auquel cas on fait preuve de prudence, on s’assure de la qualité du produit et on veille à en avoir pour son argent;
(2) dépenser son propre argent pour quelqu’un d’autre, par exemple pour l’achat d’un cadeau. Dans ce cas, on accorde moins d’attention au produit qu’à la somme dépensée;
(3) dépenser l’argent de quelqu’un d’autre pour soi-même. C’est ce qui se produit lorsqu’on notre employeur nous offre une allocation de dépenses. Le prix devient alors secondaire, mais on est exigeant quant à la qualité du produit;
(4) dépenser l’argent de quelqu’un d’autre pour autrui. C’est le cas des gouvernements qui dépensent l’argent des contribuables pour fournir des services aux citoyens. Ils ne veillent ni à la dépense ni à la qualité, car personne n’est tenu d’assumer les conséquences de ses décisions.
On comprend donc pourquoi, malgré un budget de 3 milliards de dollars, le ministère des Transports a failli à sa tâche. On comprend également que la création d’une nouvelle agence ne peut être la solution, puisqu’on ne fait que remplacer un groupe de fonctionnaires par un autre groupe de fonctionnaires chargés de dépenser l’argent de quelqu’un d’autre pour autrui. »
C’est le problème des gouvernements; ils sont du 4e type, dans l’exemple de Friedman. Et quand on ose demander des comptes, les ministres changent de dossiers, et les haut-fonctionnaires démissionnent, avec une forte prime de séparation.
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