Le titre de mon billet peut sembler défaitiste, je l’admet volontiers. Mais à mes yeux, il s’agit de la même chose que l’est l’acharnement thérapeutique, par exemple, pour un malade en phase terminale. Pourquoi je vous parle de ceci? Parce qu’un article, je devrais plutôt dire deux articles (premier, deuxième), publiés sur le site Canoë, sont venus me chercher.
Saviez-vous que Mont-Saint-Hilaire avait un itinérant? J’avoue que je n’en avais aucune idée.
L’existence même de Daniel Auclair, décédé le 6 décembre dernier, à l’âge de 53 ans, ne m’aurait jamais effleuré l’esprit, n’eut été des articles de Serge Labrosse, du Journal de Montréal, publiés sur le site Canoë, ce samedi matin. Selon les propos recueillis auprès de Francis, 25 ans, fils de Daniel Auclair, ce dernier avait tout; à 30 ans, sa maison était payée, il avait de l’argent, bref, tout allait bien, si l’on exclut la présence de la drogue; déjà « poteux » à l’adolescence, il a fini par tomber dans la cocaïne, et le crack. La suite fut rapide; vers l’âge de 40 ans, et malgré une désintox, sa femme a demandé – et obtenu – le divorce, et le jeu compulsif s’est finalement chargé d’évaporer ses dernières ressources. Puis, toujours selon ce que rapporte l’article, il a fait le choix de « partir sur le trip de vivre comme un Indien, dehors« , pour reprendre les propos de Francis.
Bref, de l’aide fut proposée à Daniel Auclair, mais il l’a toujours rejetée. Il préférait fouiller dans les poubelles que d’accepter l’offre d’un bon repas. Il a toujours voulu s’arranger tout seul. Il a finalement été trouvé mort par Lyne, une amie intime, dans le sous-bois près du viaduc ferroviaire qui enjambe la route 116, à l’entrée de Mont-Saint-Hilaire; depuis le début de l’hiver, il y aurait planté une tente, où il dormait, après avoir passé quelques semaines à dormir dans des abribus et sur des bancs de parc. Entêtement volontaire? Maladie mentale? Toujours selon Francis, il était probablement dépressif, et la drogue aurait entraîné la schizophrénie. Un cocktail bien triste, qui mène inévitablement à une fin de vie atroce.
De là ma question; à quel moment doit-on baisser les bras?
Tout le monde sait que l’on a « désinstitutionnalisé » les « moins pires » patients – la quasi-totalité de ceux-ci – des hôpitaux psychiatriques, mais au nom de la dignité humaine, faudra-t-il les « réinstitutionnaliser », question de ne pas les voir mourir dans un banc de neige? À partir de quel moment devrait-on interner une personne, dans le but d’assurer sa propre sécurité, davantage que celle des autres? Combien de fois avez-vous entendu une femme, victime de cruauté, et/ou de violence conjugale, demander quand allait-on la laisser « enfin vivre sa vie comme elle l’entend », jusqu’au jour où elle découvre, par elle-même, que sa vie est bel et bien devenue l’enfer que décrivaient – et constataient désespérément – ses proches depuis si longtemps? Quand doit-on retirer de force une personne d’un enfer dans lequel celle-ci ne se rend même pas compte qu’elle se trouve? Et la question ultime; qui doit prendre la décision?
Une chose est certaine; il est impossible d’aider une personne qui n’a pas besoin d’aide.
Si la personne se sent bien, dans sa situation, que peut-on faire, dans le but de lui démontrer que ladite situation est sans issue? Malheureusement, il y a bien peu à faire. Si l’on tente de sortir de force la personne de sa situation précaire, on risque de la voir prendre diverses échappatoires afin d’y retourner, un peu comme un enfant, à qui on interdit de manger en-dehors des repas, attendra que tout le monde soit couché pour aller au frigo. C’est évidemment triste à dire, comme ça, mais a-t-on vraiment le choix de les laisser vivre leur vie? Même si l’on sait pertinemment que ça va finir mal?
Bonne réflexion. J’attends vos commentaires.
J’habite dans une maison de chambres avec d’anciens patients psychiatrisés et à les entendre moi aussi je préférait la rue que l’hôpital. D’après tout Diogène disais pas que pour attendre la sagesse il fallait de se contenter du minimum, après tout j’aurais envie de testé sa philosophie si il y avait pas un million de danger dans les rues de Montréal causait par les junkies et la police.
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Je comprends, Alucard, que dans les rues de Montréal, c’est un peu « la loi du plus fort », et que c’est loin d’être évident.
Mais le problème, dans un endroit comme Mont-Saint-Hilaire, ou comme Beloeil, juste à côté, c’est qu’il s’agit de communautés plutôt riches, et que tout le monde se connaît. Alors le danger, c’est que l’itinérant tendra à s’isoler toujours de plus en plus. Il devient alors impossible de l’approcher, et éventuellement de l’aider.
D’un autre côté, l’un de mes amis proches, qui est en couple depuis maintenant 10 ans, et qui a une bonne situation, a connu la rue, à Montréal, et s’en est sorti par ses propres moyens. C’est donc dire que l’on peut y survivre, et même s’en sortir, pour le moins que l’on veuille bien faire un certain bout de chemin, à commencer par vouloir s’en sortir.
Bon courage.
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Aide-toi et le ciel t’aidera comme dirait le proverbe.
Morale de l’histoire, si tu es réellement dans le besoin, demande et tu recevras. Déjà qu’il y en a assez qui fraudent le système en étant de faux demandeurs, la chose la plus élémentaire à faire n’est-elle pas de faire sa petite part pour aider les VRAIS démunis.
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Ces gens là ont fait un choix et c’est encore leur droit le plus stricte. On n’a pas à porter une jugement de valeur sur ce choix sous prétexte que nous on connaît mieux ce qui est bon pour eux. Les moyens pour se « normaliser » sont disponibles à eux de faire le choix de rentrer dans le moule.
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