La Presse canadienne publie un article (un autre!) sur ce qui est désormais convenu d’appeler « l’affaire Chuck Cadman ». Cette fois, c’est le ministre de la défense, Peter MacKay, qui prétend ne rien savoir de toute cette affaire. Celui-ci était leader du caucus conservateur au moment des événements.
Et les voici, ces événements.
En mai 2005, les libéraux de Paul Martin étaient au pouvoir, et faisaient face à un vote de confiance dont les résultats promettaient d’être chauds. Tellement chauds, en fait, que le seul vote de Chuck Cadman, ancien député conservateur, devenu indépendant au printemps de 2004, allait trancher, le reste des députés étant divisés 50/50. On comptait précieusement sur la présence – et le vote – de Cadman, présence pour le moins incertaine, puisque celui-ci était atteint d’un cancer à un stade très avancé. Il est d’ailleurs décédé deux mois après le vote.
Voici maintenant les allégations.
Le journaliste Tom Zytaruk a écrit un livre, qui paraîtra le 15 mars, intitulé Like A Rock: The Chuck Cadman Story, dans lequel il prétend que Cadman, deux jours avant le vote, aurait reçu la visite de deux émissaires conservateurs qui lui auraient proposé, en retour d’un vote aux côtés des conservateurs, une police d’assurance-vie d’une valeur d’un million de dollars. La femme de Cadman, Dora, en plus de dire que c’est bien vrai, en ajoute en disant qu’il était furieux, qu’il avait considéré l’offre comme étant un pot-de-vin. La fille de Cadman, qui habite Vancouver, corrobore les allégations de sa mère.
Du côté du parti conservateur, le premier ministre Stephen Harper prétend qu’il s’agit d’allégations « fausses et irresponsables ». Les deux émissaires, pour leur part, disent qu’ils ont proposé à Cadman de réintégrer le caucus conservateur. Et dans l’article dont je mets le lien au début de ce billet, c’est au tour du ministre Peter MacKay de déclarer qu’il est au courant de rien. L’auteur du livre à paraître, quant à lui, dit avoir en sa possession des enregistrements, dont un de Stephen Harper, dans lequel il dit qu’il y a bien eu offre financière, et un autre, dans lequel Chuck Cadman lui-même dit que des offres de ce genre sont possibles, et même tout à fait normales en situation de gouvernement minoritaire.
Ce qui m’intrigue, là-dedans, c’est que Dora Cadman a été nommée candidate dans la circonscription de son défunt mari. Et devinez pour quel parti. Eh oui, pour les conservateurs! Et avec toute cette affaire, elle cherche quoi, au juste? Un rendez-vous galant avec Peter MacKay? Je peux comprendre que l’auteur du livre voit dans toute cette affaire de la pub gratuite pour son bouquin, mais elle? En tenant des affirmations de ce genre, et en mettant son propre chef dans l’eau bouillante, elle ne se fera sûrement pas des amis au sein du caucus conservateur. En fait, elle est en train de s’attribuer elle-même, en cas de victoire, une place de back-bencher que personne ne voudra lui enlever. Elle ramassera le nombre suffisant de mois pour obtenir une pension à vie, et se retirera dans ses terres.
En ce qui me concerne, tout cela n’est qu’un jeu de pouvoir. Dora Cadman a probablement promis à Zytaruk de collaborer à la promotion de son livre, mais n’a pas pensé plus loin que le bout de son nez, puisqu’elle met ainsi le chef de sa propre formation dans la merde. Pendant ce temps, le chef libéral, Stéphane Dion, déchire sa chemise en jouant les vierges offensées, mais il semble oublier que sa propre formation est tout, sauf propre. Sur quoi je me base, pour dire cela? Sur un seul mot: commandites. Je crois que c’est suffisant. Et au bout du compte, le principal intéressé ne pourra jamais témoigner de rien, parce qu’il est mort le 9 juillet 2005.
Voilà mon analyse simple et rapide d’un autre épisode d’effets de manches à la Chambre des communes.