Fusillade à Montréal: On accuse toujours la police…

On accuse toujours la police de toutes les calamités.  Mais quand on a besoin d’elle, par exemple,…

Il y a une chanson de Plume Latraverse, qui se termine avec ces mots.  Elle s’appelle “Mémoire courte”, et se trouve sur l’album “Autopsie canalisée”, sorti en 1983.  Et c’est à cette phrase que je pensais, lorsque j’ai lu les premiers commentaires, sur ce que certains, dont des journalistes, n’ont pas hésité à qualifier de “bavure policière”.  Je parle de la fusillade qui s’est produite à l’intersection des rues Saint-Denis et Christin, à Montréal, le mardi 7 juin dernier, vers 6h40 du matin, et dans laquelle deux personnes ont finalement perdu la vie, soit Mario Hamel, un itinérant de 40 ans, armé d’un couteau, et qui était en état de crise, selon la plupart des échos entendus jusqu’ici, ainsi que Patrick Limoges, un homme de 36 ans qui se rendait tout bonnement à son travail, et qui a été atteint d’une balle, qui aurait vraisemblablement ricoché.  Soulignons ici que selon cet article, paru sur le site web de la SRC (et dans lequel, accessoirement, le journaliste qualifie l’intervention de bavure policière), trois des quatre agents impliqués ont dû être traités à l’hôpital pour choc nerveux.

Pour ceux qui s’imaginent que le travail de policier en est un comme les autres, et qu’on peut parler d’une affaire comme celle-ci avec le même calme que si l’on racontait n’importe quoi (comme diraient les anglos, “been there, done that, bought the t-shirt”), je leur suggère de comparer une de leur journée de travail à celle d’un policier.  Et à chaque fois que la personne dira « Ben là, j’me suis trompé, ça arrive! », elle devra se dire qu’elle n’a pas le droit à l’erreur, et qu’elle devra faire l’objet d’une enquête méticuleuse, et approfondie, concernant tout ce qui entoure chacune de ces fois où elle s’est trompée.  Une enquête qui peut durer plusieurs mois, parfois quelques années.  Période pendant laquelle l’opinion publique, plus souvent qu’autrement, ne lui fera pas de cadeau, et où les médias n’hésiteront pas à la déclarer coupable, souvent avant même le début de l’enquête.

Voyons avec quoi les policiers doivent travailler, dans l’accomplissement de leurs tâches.

Ils ont une arme de service, et du poivre de Cayenne.  Avec tout ce qu’on a dit au sujet du pistolet “Taser”, il est facile de comprendre que très peu d’agents du Service de police de la ville de Montréal (SPVM), sinon aucun, n’en sont équipés.  Cela reste à vérifier, par contre.  Alors nous allons nous attarder sur leur arme de service, et sur le poivre de Cayenne.

Mentionnons d’abord que depuis les événements, plusieurs parlent de la “règle des 21 pieds”, qui est enseignée à tous les policiers.  Il s’agit en fait de la distance qu’un assaillant peut parcourir pendant le temps requis pour qu’un policier dégaine son arme, et fasse feu sur la masse corporelle dudit assaillant, distance qui fut évaluée à 21 pieds, soit 6,4 mètres.  D’après la version anglaise du site Wikipédia, cette règle a été conceptualisée par le sergent-formateur Dennis Tueller, de la police de Salt Lake City, en Utah, chez nos voisins du Sud.  Là-bas, l’entraînement des policiers à cette règle s’appelle tout simplement le “Tueller Drill”.  Dans cet extrait vidéo, de TVA Nouvelles, l’expert en enquêtes policières Richard Dupuis (aucun lien de parenté avec votre humble serviteur), autrefois au SPVM, explique à Pierre Bruneau ce qu’est la règle des 21 pieds, ainsi que les raisons pour lesquelles, selon son expertise, les policiers impliqués ont procédé de la façon qu’ils l’ont fait.  La question qui se pose ici; le poivre de Cayenne est-il efficace, à 21 pieds?

J’ai moi-même suivi, il y a de cela très longtemps, un cours de maniement des armes à feu.  On enseigne, entre autres, qu’il y a deux sortes de tir, lorsque l’on utilise une arme qui tire un projectile unique, à savoir le tir rasant, et le tir fichant.  Quand on pratique la chasse, on doit utiliser le tir fichant; si le projectile n’atteint pas la cible, il se fiche dans le sol, et s’y arrête.  Il s’agit du tir le plus sécuritaire.  Le tir rasant, comme son nom l’indique, fait que le projectile, s’il rate sa cible, passe à ras le sol, et poursuit sa course; le projectile est donc sujet à ricocher, que ce soit sur un arbre, sur la surface d’un lac (eh oui, un projectile ricoche aussi sur l’eau!), ou ailleurs, et nul ne peut prédire où la balle va s’arrêter.  Dans le cas de l’intervention policière de mardi dernier, comme dans la plupart des interventions en milieu urbain, d’ailleurs, le tir fichant est pratiquement impossible à réaliser; le policier doit réagir de façon instinctive, de façon à se protéger, et à protéger le public, de l’assaillant.

En passant, j’ai lu quelque part un commentaire, qui disait qu’un policier doit protéger le public, et non pas se protéger lui-même.  Je regrette, mais puisque un policier mort ne peut protéger personne, le policier doit d’abord se protéger lui-même, s’il veut protéger le public.

Une enquête a été entreprise, sur cette affaire, et par souci de transparence, elle a été confiée à la Sûreté du Québec (SQ).  Celle-ci nous permettra, espérons-le, d’en apprendre plus long sur les événements tragiques de mardi dernier.  Je profite de l’occasion pour offrir mes plus sincères sympathies aux familles de Mario Hamel (qui n’était probablement pas conscient de ses actes) et de Patrick Limoges (carrément au mauvais endroit au mauvais moment), deux personnes qui, probablement de l’avis même des policiers, n’avaient pas à mourir.

Manif du COBP, version 2011: Fallait-il vraiment s’attendre à autre chose?

Mardi dernier, c’était le 15 mars.  Et que se passe-t-il, le 15 mars?  C’est un jour béni par les amateurs de voitures, parce qu’on a le droit de remettre les pneus d’été sur sa bagnole.  Mais encore?  C’est également un jour béni par les amateurs de bisbille!  Eh oui, c’est le jour où la marmaille étudiante, entre autres, a le droit de se fâcher contre les policiers!  Enfin, c’est ce qu’ils tentent de démontrer à chaque année; en 2009, j’avais écrit ce billet, sur la protestation, et sur le grabuge qui en a résulté.  J’aurais pu reprendre le même billet, et le mettre à jour, mais j’ai préféré en écrire un tout nouveau.

Ainsi, cette année n’a pas fait exception; pour les protestataires en devenir (lire “ceux qui n’ont pas encore les moyens de se présenter sur le site de meetings politiques, du genre G20, pour aller y faire du grabuge”), et pour d’autres plus expérimentés (lire “ceux que l’on voit régulièrement autour du Centre Bell lorsque le Canadien remporte une série”), le 15 mars représente une excellente occasion de pratique générale.  Et à chaque année, depuis 1997, le Collectif opposé à la brutalité policière (COBP) organise sa traditionnelle manifestation improvisée, question de bien aiguiser les réflexes – mais surtout de tester les limites de la patience – des policiers en service, ce soir-là.

Bilan de la manif de cette année; 258 arrestations, dont la quasi-totalité (239) se sont soldées par la délivrance d’un constat d’infraction pour avoir entravé la voie publique.  Car il faut comprendre ici que le parcours utilisé par le Comité organisateur de la baston contre la police (COBP) n’est pas communiqué aux forces de l’ordre, contrairement à ce qui se passe pour toutes les autres manifestations; c’est bien sûr ce qui lui donne ce petit côté improvisé.  Mais le fait que la police ne connaisse pas le parcours de la manifestation fait en sorte que ceux-ci ne peuvent pas sécuriser à l’avance le parcours, afin d’éviter des accidents.  De ce fait, les manifestants entravent la voie publique, ce qui constitue une infraction au Code de la sécurité routière (CSR).

Évidemment, certains se sont plaints d’avoir été encerclés pendant plusieurs heures, et ce sans avoir reçu “aucun avertissement” de quitter les lieux au préalable.  C’est du moins ce que rapporte cet article de Josianne Desjardins, de l’agence QMI, citant les propos de Dominic Palladini, manifestant, mais aussi membre de l’Organisme de défense des prisonniers politiques (ODPP).  Cela fait sûrement de lui un expert en arrestation; je présume qu’il était sur les lieux afin de vérifier de visu si les agents du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) savaient faire des arrestations tout à fait légales.

Il faut supposer que celles-ci laissent encore à désirer; Sophie Sénécal, porte-parole du Collectif omniprésent des braillards persécutés (COBP), est allée dire à la même journaliste que son organisation réclame que l’enquête publique sur le travail des policiers du SPVM, demandée par rien de moins que le Comité des droits de l’homme de l’Organisation des nations unies (ONU), en 2005 (soit avant même l’affaire Villanueva), soit enfin réalisée.  Madame Sénécal est convaincue que les policiers “font tout en leur pouvoir pour saboter cette manifestation”, toujours selon ce que rapporte l’article.  Cela nous permet donc de croire que les policiers du SPVM sont tous mûrs pour le Tribunal international de La Haye, à tout le moins si l’on se fie à la porte-parole de la Coalition organisatrice du bourbier puérile (COBP).

Une chose m’intrigue, au sujet de cette manifestation; la sympathique Sonia Palato, qui a fait parler d’elle il y a un peu moins d’un an, entre autres dans ce billet, publié sur le blog Écran radar, était-elle sur place, et le cas échéant, portait-elle un beau chandail rose-nanane style pyjama du Canadien de Montréal?

Trêve de plaisanteries, j’ai quelques craintes pour la manifestation… de l’an prochain; en 2012, le COBP fêtera les 15 ans de la tenue annuelle de leur protestation, et tout porte à croire que les participants tenteront de battre des records, qu’il s’agisse du nombre de participants, du nombre d’arrestations, ou encore du nombre de vitrines fracassées.  Peut-être tentera-t-on de battre le record du nombre de policiers blessés!  Bref, on peut s’attendre à un gros party, l’an prochain!

Personnellement, je suis privilégié; d’une part, j’habite à Terrebonne, une ville (j’allais dire “un village”, mais la population dépasse les 100,000 habitants, désormais) dans laquelle tout le monde est “de Terrebonne-humeur”, ce qui signifie qu’il y a très peu de manifestations, et d’autre part, je parviens toujours à m’arranger pour ne pas être à Montréal le 15 mars, à l’heure de la sortie des classes.

Corruption alléguée: Laissons travailler la police!

Nous le savons tous, maintenant; plusieurs intervenants ont demandé une commission d’enquête sur les allégations de corruption, dans l’industrie de la construction.  C’en est presque devenu une mode.  Même le président du syndicat des policiers de la SQ a demandé une telle commission; a-t-il si peu confiance dans les capacités d’enquête de ses propres membres?

L’actualité de cette semaine nous donne un exemple frappant que la police peut très bien arriver à des résultats concluants, à partir du moment où on laisse les limiers faire leur travail.  L’ancien maire d’Outremont, Stéphane Harbour, ainsi que deux complices, furent arrêtés, et sont maintenant accusés d’abus de confiance et de fraude, notamment.  En tout, ce sont 27 chefs d’accusation qui sont portés, dont 9 contre Harbour, dix contre l’ancien directeur de l’arrondissement, Yves Mailhot, et 13 contre l’adjoint de celui-ci, Jean-Claude Patenaude.  C’est à la suite de la requête d’une conseillère de la ville, le 19 octobre 2007,  que le SPVM avait entrepris une enquête, laquelle fut remise à la SQ, quelques jours plus tard.

Cette conseillère municipale, c’est nulle autre que Noushig Eloyan, qui était chef de l’opposition à la ville de Montréal, à l’époque.  Dans cet article, de LCN, elle dit qu’il ne faut pas avoir peur de dénoncer les irrégularités que l’on constate, dans l’administration gouvernementale.  Au sujet de cette affaire, elle dit avoir demandé de nombreuses explications, sur les irrégularités soulevées à l’hôtel de ville d’Outremont, et à chaque fois, elle s’être heurtée au mutisme du maire Gérald Tremblay.  Elle a donc refilé le tout aux policiers.  Je veux bien croire qu’ils y ont mis deux ans et demi, mais au moins, ce ne fut pas inutile.

Alors à tous ceux qui déchirent leur chemise, pour obtenir une commission d’enquête, sur l’industrie de la construction, je réponds « Laissez travailler l’escouade Marteau! »  Les résultats pourraient être surprenants.

Dany Villanueva: Un bon petit garçon, vraiment?

Lorsque j’ai commenté l’affaire Villanueva, en août 2008, je mentionnais les frasques judiciaires de Dany Villanueva, dans mon exposé qui visait à savoir s’il pouvait avoir une part de responsabilité dans la mort de son frère, Fredy, tombé sous les balles d’un agent du SPVM, lors d’une opération policière qui a mal tourné.  À l’époque, je me suis fait traiter de n’importe quoi, dont de raciste, mais cela faisait partie de l’affaire; celle-ci a toujours été une affaire excessivement émotive.

Voilà que l’on apprend, ce matin, que Dany Villanueva a été intercepté par les patrouilleurs du Service de police de Repentigny, avec des amis, à bord de sa voiture, à l’angle du boulevard Céline-Dion et de la rue Notre-Dame, à Charlemagne.  En plus d’être en bris de probation, il a échoué le test de l’ivressomètre, et avait sur lui une petite quantité de cannabis.  Sa mère n’a pas fini d’avoir des faiblesses, la pauvre.  Mais mettons les choses au clair.  Il semble plutôt évident que de deux choses l’une; soit qu’elle a oublié d’enseigner quelques principes élémentaires à ce fils en particulier, ou encore que Dany s’est totalement foutu de sa mère, et n’en fait qu’à sa tête.  Comme il semble que feu son frère, et ses soeurs, n’ont jamais fait les manchettes judiciaires, je tends vers la deuxième option.  Parmi ces principes élémentaires, il y a celui de se tenir peinard, lorsque l’on est en probation, afin d’éviter de se mettre dans de sales draps, et d’empirer sa situation.

Or, ses dernières frasques tendent à démontrer que le pauvre Dany n’en fait qu’à sa tête.  Lui et ses potes devront passer par le Palais de justice de Joliette, ce matin, pour bris de probation.

Affaire Villanueva: Est-ce à cela que Richard Martineau pensait?

Dans une de ses chroniques, publiées dans le Journal de Montréal, à savoir celle de ce vendredi (hier), Richard Martineau évoquait la responsabilité des parents, entre autres, dans l’affaire Villanueva.  Il est vrai qu’une poursuite, impliquant des parents dont les ados ont commis un crime d’incendie, à Berthierville, devait être entendue à partir de lundi prochain (1er juin), au Palais de justice de Joliette, poursuite qui semble s’être réglée à l’amiable, selon cet article de Dany Doucet, du JdeM, aussi publié sur le site Canoë.

En lisant la chronique de Martineau, hier, j’avais une impression de lire des propos que j’avais déjà lu, sur ce sujet.  Il cite un passage de la chronique du 14 août 2008 de son collègue du Journal de Québec, Jean-Jacques Samson, qui disait, en gros, que les Villanueva étaient responsables de leur propre malheur.  Il y a eu aussi, deux jours avant, ce billet que j’ai écrit ici, billet vers lequel Richard Martineau lui-même avait mis un lien, dans son propre blogue.

Je me pose donc la question; est-ce à ce genre de poursuite, celle qui devait s’instruire à Joliette, ce lundi, que Richard Martineau pensait, quand il a écrit sa chronique de vendredi?

C’est vrai qu’il est trop facile de pointer les policiers du doigt, dans de telles situations.  Comme l’évoque Martineau, dans sa chronique de vendredi, et comme je le soulevais aussi dans cet autre billet, il faut commencer par savoir ce qui s’est réellement passé le 9 août 2008, en début de soirée, sur les lieux des événements, avant d’aller plus loin et de ratisser large.  Dès la première journée de l’enquête du juge Robert Sansfaçon, il fut possible d’apprendre que les policiers de la SQ, chargés de l’enquête, se sont contentés d’un rapport des deux policiers du SPVM, et ne les ont pas interrogé.  C’est déjà une piste à approfondir.  Si le tas d’organismes qui se sont inscrits, puis désistés, dans le but de voir leur nom dans les bulletins de nouvelles, avaient été présents lors de cette journée d’enquête publique, tels qu’ils l’avaient souhaité, leurs représentants – ne serait-ce qu’un seul avocat pour l’ensemble des groupes présents – auraient pu questionner les policiers de la SQ, afin d’en savoir plus long sur leurs méthodes de travail, et le tout aurait peut-être changé la décision de ne pas porter d’accusation envers les deux policiers du SPVM.  Mais non, ils ont préféré la loi du moindre effort, à savoir se désister, faire des points de presse, et crier au racisme.  Il s’agit là, à mes yeux, d’une autre perte flagrante de leur crédibilité, dans toute cette affaire, et met en évidence que leur seul but, à travers toutes leurs pressions, c’est d’envoyer les deux policiers, impliqués dans les événements qui ont mené à la mort de Fredy Villanueva, directement en prison, et ce sans permettre au public de savoir le fond des choses, et plus précisément ce qui s’est produit, le 9 août 2008.

Par contre, je me demande si une telle poursuite, comme celle qui impliquait les parents des deux ados de Berthierville, serait possible, dans l’affaire Villanueva; après tout, Fredy, comme Dany, étaient majeurs, au moment des événements.