Filière batteries: Des projets semblent avoir de l’eau dans le gaz

Ce matin, je lisais un article de Benoît Charette, sur le site web de l’Annuel de l’auto, qui date du 31 octobre dernier, et qui semble indiquer que le projet d’usine de composantes de cathodes de batteries, de Ford, en partenariat avec les coréennes EcoPro BM et SK, serait à nouveau sur pause. Ce projet a connu quelques arrêts, depuis son inauguration, en août 2022*.

Je me suis mis à la recherche d’autres sources, et je suis tombé sur un article de Francis Beaudry, de la SRC, aussi publié le 31 octobre dernier, selon lequel Ford se retire du projet, mais que le principal investisseur, EcoPro, poursuivait la construction, après une pause. Les travaux ont repris fin septembre, début octobre. L’article dit aussi qu’un porte-parole de Ford a confirmé, par courriel, que la firme se retirait du projet, à titre de partenaire minoritaire.

Dans La Presse, c’est Julien Arsenault qui a publié un article, qui reprenait la même nouvelle, à savoir que Ford retirait ses billes, allant même jusqu’à dire que le constructeur n’avait finalement jamais joint officiellement le consortium derrière ce projet, et que maintenant, c’est EcoPro qui “prend toute la place” dans le projet.

Si l’on ajoute cela aux délais de Northvolt, en Montérégie, c’est une bonne partie de la “filière batteries” qui semble avoir “de l’eau dans le gaz”, pour reprendre une expression bien de chez nous. Quand les gouvernements nous ont annoncé le grand projet, ils semblaient dire qu’il était important d’agir rapidement dans ce dossier, question d’être aux premières loges, d’être les pionniers dans le domaine. Un an et des poussières plus tard, force est de constater que le fait d’agir vite pourrait nous laisser avec quelques “corps morts” d’usines qui ne seront jamais mises en production.

Le fait est que les ventes de véhicules électriques tournent au ralenti, ces temps-ci; la fin des subventions gouvernementales ne semble pas convaincre les consommateurs de se porter acquéreurs de véhicules électriques. Lorsque les premiers modèles ont été mis en vente par les divers constructeurs, il y a plusieurs années, les enthousiastes se sont précipité aux portes des concessionnaires, laissant place à des listes d’attente de plusieurs mois, pour ne pas dire de quelques années. Mais une fois ces amateurs de l’électrique contentés, les ventes ont considérablement ralenti, faisant en sorte que les cours des concessionnaires sont désormais remplies à capacité; les constructeurs doivent consentir des rabais substantiels pour permettre de liquider les inventaires.

Et là, on ne parle même pas de la mauvaise presse; les médias sociaux sont inondés de vidéos d’incendies de véhicules électriques, et de gens qui tombent en panne par manque de courant, soit parce que le réseau de bornes de recharge n’est pas au point, soit parce que l’on a parfois surestimé la capacité restante de la batterie. En plus des messages, postés dans les jours suivant les tempêtes majeures, du genre “Vous êtes à la maison, et vous devez vous déplacer dans la tempête, mais la batterie de la voiture est morte, et vous n’avez pas d’électricité. Vous faites quoi?” Bref, tout cela vient mettre du négatif sur toute l’affaire des véhicules électriques.

Bon, je ne dis pas que toute la filière va faire faillite, et que les gouvernements vont manger leurs bas avec cela, mais je crois que la rapidité, pour “être le chef de file”, comporte aussi des risques, qui sont loin d’être négligeables.

* Selon les autres sources, le projet du chantier aurait plutôt été inauguré en août 2023.

Révision de la carte électorale: Il faudra un jour se brancher

Je suis tombé, tôt ce matin, sur un texte de Hugo Pilon-Larose, sur le site web de La Presse, qui traite de la révision de la carte électorale du Québec, texte dans lequel le député de Matane-Matapédia, le péquiste Pascal Bérubé, se plaignait que l’agrandissement de sa circonscription, ainsi que d’autres circonscriptions de la région gaspésienne, du fait d’une éventuelle fusion des circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure, mettrait sa sécurité en danger; les routes peuvent être dangereuses, surtout en hiver, d’autant plus que la connexion cellulaire n’est pas disponible partout, selon lui.

À mes yeux, cette situation me démontre que le député de Matane-Matapédia a du pain sur la planche d’ici la fin de son mandat, à savoir d’améliorer l’état des principales routes de sa circonscription, en plus de les doter du signal cellulaire. Je veux dire, quand il y a de la poudrerie, les routes sont dangereuses, peu importe où l’on se trouve dans notre belle province. Et comme disent les policiers de la Sûreté du Québec lorsque l’on se fait intercepter pour aller un peu trop vite, il fallait partir plus tôt.

Bref, tout cela pour dire que les arguments de monsieur Bérubé sont bien minces pour défendre les prochaines modifications à la carte électorale. Parce que, comme c’est mentionné dans le texte de monsieur Pilon-Larose, les changements que l’on veut faire sont de réduire la Gaspésie et la région de Montréal d’une circonscription chacune, et de créer deux nouvelles circonscriptions, une dans les Basses-Laurentides, et l’autre dans la région des Bois-Francs, le tout en fonction des mouvements de population sur le territoire.

Parce que la Loi électorale est ainsi faite qu’au lieu d’ajouter des circonscriptions sur le territoire, le nombre de celles-ci est fixé à 125, question de ne pas avoir à agrandir le Salon bleu, ou à entasser les élus les uns sur les autres. Ainsi, pour garder le nombre à 125, il faut réviser la carte afin que chaque circonscription représente plus ou moins le même nombre d’électeurs, révision qui se fait habituellement à toutes les deux élections générales. Ainsi, quand une région voit sa population diminuer, elle se fait retrancher une circonscription, et au contraire, une région dont la population augmente se verra ajouter un nouvel élu. C’est la Commission de la représentation électorale (CRE) qui a le mandat de procéder à la révision de la carte, à travers un processus bien établi dans la loi. Il y a d’ailleurs une page, sur le site web d’Élections Québec, qui explique tout le processus.

On retrouve aussi, dans la Loi électorale, le principe d’exception; celui-ci s’applique lorsqu’une circonscription ne peut compter le nombre d’électeurs moyen prévu par la loi; cette fois-ci, on parle de 50,694 électeurs, plus ou moins 25%. Les seuils sont de 63,368 au maximum, et de 38,021 au minimum. C’est le cas pour les Îles-de-la-Madeleine, pour laquelle le statut d’exception est enchâssé dans la loi électorale, mais aussi pour cinq autres circonscriptions, à savoir Ungava, Abitibi-Est, Abitibi-Ouest, Duplessis et René-Lévesque, qui se retrouvent toutes sous le minimum. Selon un article de Véronique Duval, du site web de Radio-Canada, publié le 27 octobre 2023, soit après les audiences publiques de l’automne dernier, la carte électorale de 2017 accordait le statut d’exception aux circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure. L’article explique également pourquoi certaines circonscriptions profitent du statut d’exception.

Pour ma part, d’abord et avant tout, je regrouperais la circonscription des Îles-de-la-Madeleine avec celle de Gaspé, et ce pour la simple et bonne raison que dans la très grande majorité des divisions administratives, tant au provincial qu’au fédéral, les îles sont déjà rattachées à la Gaspésie, et personne n’en est mort. C’est ben beau de vouloir une représentation régionale forte, mais à un moment donné, il faut aussi se mettre les yeux devant les orbites, et comprendre que rien ne peut expliquer que 11,176 électeurs – c’est le nombre aux îles – aient le même poids politique que les 60,791 électeurs de la circonscription d’Arthabaska. Si l’on continue comme ça, la moitié des circonscriptions vont devenir des exceptions, et ce pour des fins d’identité régionale. S’il faut “tasser la ligne” un peu plus, ben tassons la ligne, un point, c’est tout. Je veux dire, si je prends par exemple Lebel-sur-Quévillon, les gens de la place se sentent probablement beaucoup plus proches de l’Abitibi que de Kuujjuaq; pourtant, Lebel-sur-Quévillon, comme Kuujjuaq, sont dans Ungava. Et comme c’est écrit dans l’article de madame Duval, il y a déjà onze circonscriptions qui sont plus grandes que les potentielles futures Gaspé-Bonaventure et Matane-Matapédia. Ce à quoi j’ajouterai que non seulement il n’y a pas de couverture cellulaire partout, dans Ungava, mais il n’y a souvent même pas de route.

Au final, je trouve que Pascal Bérubé fait sa drama queen, dans ce dossier. S’il trouve que son job est trop compliqué, il n’a qu’à revendiquer un siège dans la grande région de Montréal, et à laisser Matane-Matapédia à quelqu’un qui prendra son rôle à coeur, avec les difficultés que cela comporte. Il faudra, un jour ou l’autre, se brancher; on fait 125 circonscriptions à peu près égales en termes de population, ou on fait dans le régional, et au diable les proportions.

Pannes du REM: C’était écrit dans le ciel

Dans un article d’Henri Ouellette-Vézina, mis à jour le 27 janvier, le site web de La Presse nous informe qu’une panne a eu lieu dans le service du Réseau Express Métropolitain (REM) aujourd’hui, entre les stations Panama et Île-des-Soeurs; des travaux de déglaçage des haubans du pont Samuel-de Champlain a forcé l’interruption du service pendant une partie de la journée, le service reprenant aux environs de 17h00. Et comme ces deux stations sont situées en milieu de parcours, les usagers devaient descendre du train à Panama, prendre les bus jusqu’à l’île des Soeurs, et reprendre le train léger à partir de cette station, vers le centre-ville de Montréal, et vice-versa pour revenir sur Brossard.

C’est entendu, un service de ce genre connaîtra des interruptions de temps à autres; la perfection n’étant pas de ce monde, il arrive que ce système, comme tous les systèmes par ailleurs, vienne à lâcher par moments. Le problème, c’est que le REM vient de faire un quatre-en quatre; quatre pannes en quatre jours. Vendredi après-midi, tout le système vers le centre-ville était en panne, alors que cela fonctionnait vers Brossard, le tout causé par un bris d’équipement. Jeudi, ce sont les portes palières qui sont tombées en panne pendant les précipitations de verglas, empêchant le système de fonctionner, problème qui est également survenu la veille au soir (mercredi), en pleine heure de pointe.

Ça aussi, c’était écrit dans le ciel; de tels trains, déjà en service ailleurs au Canada, fonctionnent par intermittence, celui d’Ottawa étant particulièrement problématique. Et ça, votre humble serviteur vous l’avait dit; il avait même proposé que les rails du REM soient installés de façon affleurante, un peu comme les rails de tramways, dans les rues d’une ville. En cas de problème, les bus de remplacement pourraient utiliser l’emprise du REM pour circuler d’une station à l’autre, n’ayant même pas à se taper les aléas de la circulation. Mais l’opinion de l’auteur de ce blogue vaut bien peu auprès des décideurs publics.

Reste que pendant ce temps, la mairesse de Brossard, Doreen Assaad, commence à en avoir plein son casque, selon ce que l’on peut lire sous la plume d’Antoine Ericher, du site web de la station de radio FM 103,3. Elle, qui se plaint que le service de bus a subi une “disparition forcée”, s’attend désormais “à ce que les transports en commun soient fiables”, alors qu’elle se dit en contact avec les responsables de CDPQ-Infra (la division de la Caisse de dépôts et placements du Québec qui investit dans les infrastructures, et gère le REM) et les autorités gouvernementales sur “le besoin urgent d’un service plus fiable et plus efficace”.

Et ça, ce n’est rien; pour le moment, il n’y a qu’une seule ligne d’ouverte. Quand les autres lignes vont ouvrir (et ne me demandez pas quand cela va se produire; c’est une autre histoire!), des problèmes vont aussi survenir les autres lignes. Avec les complications, les solutions de remplacement archaïques, et le chialage des élus devant la situation. Bref, on ne perd rien pour attendre.

Stade olympique: Il faut arrêter les frais

Je viens de lire une intéressante chronique de Michel C. Auger, sur le site web de La Presse, sur les coûts de mise à niveau du Stade olympique de Montréal, texte qui date du 17 décembre dernier. Voici d’abord le texte de monsieur Auger ici, et je mettrai mes commentaires après celui-ci. Allons-y.

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Trop d’architecture, pas assez de stade

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE Comme monument, le Stade est une grande réussite. Comme lieu de rassemblement pour des évènements sportifs ou culturels, c’est un gigantesque fiasco, écrit Michel C. Auger.

Michel C. Auger Collaboration spéciale

1. Consultez le rapport du juge Malouf

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Ah bon? Vous êtes bien certain de cela, monsieur Auger?

Je crois qu’il y a des gens sérieux qui n’ont qu’une seule envie, soit de démolir le stade, et de récupérer les terrains pour construire des logements à prix abordable, dont la ville a cruellement besoin. Ce stade, d’abord construit hors du centre-ville, en plus des défauts rapportés par monsieur Auger, défauts vérifiables que je ne conteste aucunement, coûtera les yeux de la tête à mettre aux normes. À elle seule, la facture de la rénovation de la création du regretté Roger Taillibert, même si on n’en connaît pas les détails, permettrait de financer une bonne partie des rénovations, et des ajouts, nécessaires pour obtenir (ou devrais-je dire réobtenir) un réseau autoroutier digne d’une métropole.

Évidemment, une démolition du stade ne sera pas gratuite pour autant. Mais au moins, cela ne sera plus à recommencer aux vingt ans, d’une part, et d’autre part, la facture sera probablement sous le milliard. Et comme je le mentionnais, les terrains pourront servir à la construction de nombreux logements, qui permettraient de stabiliser le prix des loyers dans le grand Montréal, à défaut de le baisser. Et si l’on veut garder un témoin de la grande époque des jeux de la XXIe olympiade, on peut toujours garder la tour inclinée, un peu comme on a conservé un ou deux piliers de l’ancien pont Champlain. En s’assurant que la tour soit capable de rester debout par elle-même, bien entendu. On y fait un musée des olympiques de 1976, et la mémoire est perpétuée.

Rentabiliser le Stade olympique, c’est peine perdue; il faudrait y présenter trois événements par soir afin de penser “rentrer dans son argent” un jour. Et comme Taylor Swift ne viendra probablement pas y tenir une résidence à long terme, il vaut mieux oublier le projet.

COVID-19: Quand un virus sert de prétexte (ou réponse à François Audet)

Depuis quelques semaines déjà, le nouveau coronavirus, à l’origine de la COVID-19, est en train de virer la planète sens dessus dessous; les gouvernements deviennent dictatoriaux, sous prétexte de vouloir sauver des vies (ce qui reste encore à prouver, d’ailleurs), et le bon peuple en redemande.  On le voit au Québec, où le premier ministre, François Legault, va finir par manquer de trucs à fermer si la pandémie dure encore quelques dizaines de jours.

Pendant ce temps, d’autres moralisateurs à deux balles se permettent de faire des liens entre la COVID-19 et leur vision du monde, bouleversée par ce qui ne fait pas leur affaire.  Voici un exemple de ce que j’avance; le directeur de l’Institut d’études internationales de Montréal, de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), François Audet, se commet dans une opinion diffusée dans La Presse+, le 1er avril dernier, sous le nom de Coronavarice.  Et comme j’aime le faire de temps en temps, je mets le texte intégral ici, cette fois en vert, et j’y réponds au fur et à mesure du texte.  C’est parti.

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Opinion : COVID-19

Coronavarice

Alors que l’on commence à peine à saisir l’ampleur de l’épidémie, mais surtout, des transformations profondes qui nous attendent au lendemain d’une éventuelle victoire, nous sommes forcés de constater que nous n’avons pas encore bien compris l’origine de cette épidémie.

Au-delà de l’épidémiologie et des enjeux de santé publique à la source de ce nouveau virus, cette épidémie est essentiellement le fruit de notre aveuglement volontaire à toutes les conséquences de notre surconsommation et de notre incapacité à faire des compromis dans nos modes de vie. Parce qu’investir dans l’inutile finit par coûter cher. En somme, c’est le prix que nous payons pour cette mondialisation asymétrique, inconsciente et effrénée.

Les conclusions que vous en tirez, monsieur Audet, ne sont que votre opinion, et rien d’autre.  Est-ce à dire que le remplacement des pailles de plastique par des pailles de carton, il y a un an, fut totalement inutile?  Sérieusement, il faut comprendre qu’en ce bas-monde, l’inutile des uns est l’emploi des autres, et ce que vous voyez comme du superflu est ce qui permet à des centaines, voire des milliers de personnes, de gagner honorablement leur vie.  Je préfère m’en tenir à l’épidémiologie et aux enjeux de santé publique.

Sérieusement, pendant combien de temps pensions-nous vraiment que nous aurions pu maintenir ce rythme ? Quand on est rendu à faire la queue au sommet de l’Everest comme chez Ikea un jeudi, à construire des hôtels et des glissades d’eau sur les dernières plages vierges et les sites protégés de la planète, à couper les dernières forêts pour le « profit ». Sérieusement ?

Ce rythme, comme vous dites, s’est maintenu plus longtemps que jamais; cela faisait pas moins de 11 ans que l’économie, malgré quelques soubresauts, s’améliorait.  À tous les temps-en-temps, il survient un événement (cette fois un nouveau virus, mais dans le passé, ce fut une surchauffe d’un secteur donné de l’économie, un acte terroriste, une mauvaise décision gouvernementale, ou diverses autres raisons) qui fait que l’économie ralentit.  Cette fois est juste la dernière en date.

Là, vous me dites, quel est le lien ? La corrélation est pourtant simple. Au lieu de penser à qui nous sommes, nous agissons pour ce que nous voulons. « Everything now », comme le chantent si bien mes amis d’Arcade Fire. Alors que nos ressources et notre génie auraient dû être investis dans la recherche, dans la santé, dans l’éducation, dans la coopération et l’aide internationale ainsi que dans la prévention, on a préféré le plastique cheap, le kérosène des avions et le clientélisme.

Vous savez, monsieur Audet, il est prouvé que l’on peut marcher, et mâcher de la gomme, en même temps.  Cet exemple vient illustrer que la recherche, la santé, l’éducation, la coopération, l’aide internationale et la prévention ont profité, ces dernières années, de beaucoup de ressources et de génie, contrairement à ce que vous semblez croire, et ce tout en mettant de l’argent dans ce que vous appelez le plastique cheap, le kérosène des avions et le clientélisme.  Avant que ne tombe ce virus, le monde allait trop vite, bien sûr, mais allait aussi très bien.

En effet, la propagation du virus est le produit d’une mondialisation aveugle et anthropocentrique. La vitesse à laquelle se répand actuellement le virus est simple : notre désir frénétique de voyager à tout prix.

La vitesse à laquelle se répand actuellement le virus est tout simplement ce que Lucien Bouchard appelait, du temps qu’il était au pouvoir, “le défaut des qualités” de notre monde moderne; à moins de 48 heures d’avis, des gens de partout dans le monde pouvaient se réunir à peu près n’importe où dans le monde.  Évidemment, dans cette situation, il ne faut pas beaucoup de temps pour qu’un virus se propage.

Alors qu’un salon du livre en Belgique aurait dû être annulé, on l’a maintenu pour éviter des pertes financières, au prix de centaines de vies. Alors que des voyages personnels et des ententes commerciales devraient être remis, des milliers d’avions continuent de tracer au-dessus de nos têtes, au moment où vous lisez ces lignes, transportant avec eux les hôtes inconscients de la COVID-19.

Il faut aussi reconnaître que si tous les vols commerciaux sont annulés en même temps, des milliers de personnes seront coincées, sans possibilité de revenir chez eux.  Le problème, avec la pandémie actuelle, tient davantage du laxisme de certains gouvernements dans leur réaction face à celle-ci qu’à la décision de quelques organisateurs d’événements qui tenaient à poursuivre comme si de rien n’était.  Un salon du livre, en Belgique ou ailleurs, n’est pas vraiment organisé par des multinationales avides de gains financiers, mais plutôt par des organisations régionales ou nationales, subventionnées par les différents ordres de gouvernement.

Ainsi, l’avarice est le cancer de cette mondialisation et son principal vecteur de transmission.

Vous avez trop regardé “Les pays d’en-haut”!  L’avarice n’a rien à voir avec la transmission de ce virus; comme je le disais, c’est le laxisme de certains gouvernements, principalement au niveau du contrôle des frontières, qui fut le principal vecteur de transmission.

Vous en doutez ? Alors pourquoi attendons-nous tous, avec une impatience presque existentielle, de « reprendre une vie normale » en espérant oublier cette parenthèse ? Nous sommes tous assis devant notre ordinateur à attendre le moment où le bon docteur Arruda nous dira : « Voilà, c’est fini ! » Nous pourrons enfin délier nos doigts et appuyer sur « confirmer » tous ces paniers d’achats, tous ces voyages en attente, toute notre inconscience…

Nous attendons tous de “reprendre une vie normale” parce que la race humaine est faite pour communiquer, pour échanger, pour se réunir.  Et pas seulement virtuellement!  Nous avons hâte de revoir nos familles, nos amis, et nos collègues.  Nous avons hâte au retour des poignées de main, des câlins, des rencontres fortuites, que ce soit au coin de la rue, ou à l’autre bout du monde.  Les humains, enfin pour la plupart, ont une vie sociale, et veulent la reprendre au plus tôt.  C’est tout!

Quelles sont les solutions ? 

Il en existe plusieurs. Elles seront douloureuses et passent toutes par le même chemin : modifier complètement notre mode de vie, notre mode de consommation, nos voyages, et nos investissements sociaux.

Il en existe plusieurs, en effet, mais je ne suis pas d’accord avec les vôtres.  Notre mode de vie est très bien.  Peut-être devrions-nous examiner certains aspects de celui-ci, mais habituellement, l’évolution de notre mode de vie, s’il a parfois certains travers, permet à l’ensemble du monde d’être meilleur.

Le salut passera par notre système d’éducation qui doit enseigner la pensée critique. En particulier nos universités qui doivent éviter d’encourager la perpétuation aveugle de ce système autodestructeur. Les dirigeants de demain devront être formés différemment.

Si le retour de la pensée critique doit servir à quelque chose, c’est d’abord et avant tout pour mettre fin à ce que j’appellerais ces “zones de pensée unique”, que l’on trouve de plus en plus dans les universités, justement (et l’UQAM en fait partie), et qui ne permettent aucune forme de débat d’idées.  C’est de l’affrontement des idées que naît la lumière; il faut revenir, de toute urgence, à ce principe.

Le salut passera par des entreprises qui valoriseront toute l’ingéniosité humaine au service de l’intérêt public, et non pas à l’unique petit profit des investisseurs pour des produits inutiles et suremballés. Le salut passera par nos politiciens qui cesseront de se faire influencer par le clientélisme et écouteront la science avec une administration publique forte, pour l’intérêt de la population.

Comme je le mentionnais, l’inutile des uns est le gagne-pain des autres.  Aussi, qui sommes-nous pour juger de ce qui est inutile?  Déjà, au Québec, beaucoup de gens se plaignent que le gouvernement a fermé des entreprises dites “non-essentielles”, alors que plusieurs en auraient bien besoin.  En ce qui a trait au clientélisme, je vous ferai remarquer que les “groupes de pression” ne sont rien d’autre que des lobbyistes avec des demandes sociales.  Quant à une administration publique forte, l’expérience démontre qu’à part des déficits, elle n’apporte pas grand chose de plus à un état.

Le salut passera surtout par la refonte d’une gouvernance mondiale. Celle-ci est nécessaire pour que des institutions solides, comme l’Organisation mondiale de la santé, assurent un dialogue entre les nations, réfléchissent, anticipent et trouvent des solutions de rechange à notre mondialisation anarchique et aux enjeux démographiques, vers une meilleure coopération internationale.

Or, la refonte d’une mondialisation nécessite un leadership politique positif tout aussi fort qui fait malheureusement actuellement défaut.

Je ne suis pas contre les échanges d’informations entre les pays, mais je mets un bémol à tout ce qui s’appelle “gouvernance mondiale”.  Je ne crois pas que les nord-américains apprécieraient se faire dire quoi faire par des européens, et vice-versa.  La gouvernance actuelle, à défaut d’être parfaite, est très correcte, à mes yeux, et le monde n’a aucunement besoin de centralisation des pouvoirs politiques.

On ne peut compter sur la puissance américaine, elle-même malmené par la « coronavarice » et une présidence bipolaire. Le G20 est paralysé et les Nations unies sont toujours en quête d’une légitimité. Qui plus est, la plupart des chefs d’État occidentaux sont eux-mêmes le produit d’un clientélisme travaillant très fort pour le maintien de ce système devenu une inertie cimentée. N’oublions pas que nous les avons élus. On est bien loin de l’idéalisme de Wilson, et on n’a qu’à voir la quasi-absence de générosité des grandes fortunes mondiales, incluant les nôtres, dans la crise de la COVID-19 actuellement.

En toute franchise, je préfère les divers systèmes actuels à une gouvernance mondiale.  Et n’oublions pas qu’un système électoral dit proportionnel n’amène que des gouvernements de coalition, qui se font et se défont pour un oui ou pour un non, et qui demandent six mois de négociations pour acheter une boîte de crayons de bois.  Cette image est forte, c’est vrai, mais dans les faits, elle est assez proche de la vérité, avouez-le.  En passant, de quel Wilson parlez-vous?  Woodrow?

En fait, le vrai salut passe par l’humanité de cette prochaine génération post-épidémie, qui reprendra les rênes d’une planète bien mal en point. Mais les biologistes disent souvent que la vie finit toujours par trouver une solution. Et du côté de l’humanitaire, on dit souvent de ne jamais sous-estimer une population en situation de survie. Dans ce cas, souhaitons que la claque au visage que le néolibéralisme aveugle, générée par notre avarice, soit suffisamment forte pour nous éveiller individuellement et collectivement. Sinon, la prochaine épidémie pourrait être la dernière.

À chaque épidémie, d’aucuns craignent que la prochaine soit la dernière.  Mais c’est mal connaître le genre humain.  À chaque fois qu’il s’est retrouvé au pied du mur, il a trouvé une façon de se sortir de son malheur, et de revenir encore plus fort.  Malgré ce que certains prétendent, le genre humain est plus “humain” que jamais; la pauvreté extrême recule dans le monde, de plus en plus de gens ont accès à l’eau potable, bref, lentement mais sûrement, le monde devient meilleur.  Il ne faut juste pas perdre espoir.  Ça va bien aller!

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