Projet Apuiat: Il faut se mettre les yeux en-face des trous

En furetant sur le web, comme je le fais quand j’ai un peu de temps, je suis tombé sur un article de Marie-Ève Doyon, publié dans le blogue des Spin-Doctors, du Journal de Montréal, article intitulé Déterrer la hache de guerre.  Si je vous en parle, vous vous en doutez bien, c’est parce qu’il a retenu mon attention.

Dès l’ouverture, madame Doyon mentionne que le fait que le gouvernement Legault n’aille pas de l’avant avec le projet Apuiat représente “une gifle en plein visage” pour les Innus de la Côte-Nord.  À mes yeux, si tel est le cas, force est de constater que les Innus se sont laisser bercer d’illusions, soit par l’ancien gouvernement libéral, soit par Boralex, le promoteur du projet, soit par les deux.  La lettre d’Éric Martel, PDG d’Hydro-Québec, en août dernier, aurait été un signal d’alarme suffisant pour jeter un nouveau coup d’oeil à l’ensemble du projet.

Madame Doyon poursuit en mentionnant que “Toutefois s’il était réalisé, le projet aurait pour avantage de générer 300 à 400 emplois pendant toute la durée de la construction des éoliennes dans une région où le taux de chômage est l’un des plus élevés au Québec”.  Je veux bien croire, mais cela me fait penser à ce que racontait Fred Thompson quand il disait – de façon sarcastique – que sa façon préférée de stimuler l’économie est de donner une pelle à chaque chômeur; la moitié des chômeurs creusent des trous, et l’autre moitié les remplissent.  Chacun retire sa paye le jeudi, et tout le monde est heureux! Je veux bien trouver des jobs à des chômeurs, mais encore faut-il que je ne les paie pas inutilement.  Construire des éoliennes alors que l’on est en surplus d’électricité, ça revient à la même chose que de creuser des trous dans le seul but de les remplir.

Cela me rappelle le temps où Gilles Duceppe, alors chef du Bloc québécois, implorait les gouvernements d’investir deux milliards de dollars dans l’industrie forestière québécoise, au moment où cette industrie était en pleine crise; ç’aurait été brillant d’abattre des millions d’arbres, et de les faire débiter dans des scieries, juste pour regarder les madriers se tordre dans les cours à bois!

Quand madame Doyon ajoute que “En faisant son calcul des coûts/bénéfices, le gouvernement ne tient pas compte des retombées intangibles qui pourraient émerger du projet Apuiat. La valorisation des 9 communautés innues de la Côte-Nord, la possibilité pour toute cette communauté de participer à un grand projet et le climat de collaboration qui s’établirait entre les Innus, Hydro et le gouvernement ne sont que quelques-uns des nombreux avantages liés à la poursuite des travaux dans ce dossier”, elle oublie un peu trop rapidement un autre “grand projet” qui impliquait les Premières nations, en Basse-Côte-Nord, cette fois; il avait été confié à une organisation qui portait le nom de Pakatan Meskanau de la Grande Séduction, qui était composée de cinq municipalités et de deux nations Innus, et devait construire, à terme, la route 138 entre Kégaska et Vieux-Fort.  Près de 400 kilomètres de route, à construire d’abord en route forestière, puis à améliorer au moment jugé opportun.  En 2006, le gouvernement de Jean Charest accorde 100 millions$ sur 10 ans pour débuter le tout.  En 2010, une somme supplémentaire de 120M$ est allouée.  En date de février 2015, 47M$ ont été dépensés, seulement 12 km de route ont été construits, et les relations entre Pakatan (soutenue par Génivar, maintenant WSP), les entrepreneurs (locaux pour la plupart), et le MTQ (principalement son bureau de la Basse-Côte-Nord), ont été, pendant à peu près tout le projet, tout simplement pourries.  Aujourd’hui, les villages isolés de la Basse-Côte-Nord sont toujours aussi isolés.  Alors, l’histoire de “participer à un grand projet”, à mes yeux,…

Je ne dis pas qu’il faille regarder les Premières nations de haut, je dis seulement que tous les intervenants, y compris les Premières nations, doivent se mettre les yeux vis-à-vis des trous, et regarder la réalité en face! On veut pousser un projet dont on ne veut pas acheter le produit, pour cause de surplus d’inventaire! L’hiver s’en vient; imaginez qu’à chaque demeure, il y a déjà deux souffleuses à neige, que les entrepôts des distributeurs sont remplis de souffleuses à neige et que l’on vienne vous demander de participer à la construction d’une superbe usine… de souffleuses à neige!  Je suis convaincu que madame Doyon serait la première à dire que cela ne fait aucun sens.  Mais aujourd’hui, elle veut nous convaincre du contraire.  Au lieu de nous réciter du Félix Leclerc, vous devriez mettre vos yeux en-face des trous, madame!

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Rapport Payette: Le monsieur n’est pas content de la réaction des radios

Il y a quelques semaines, sortait un rapport de Dominique Payette, commandé par Pauline Marois, suite à sa défaite de l’an dernier, rapport d’une étude sur les médias de la vieille capitale.  Je n’ai pas lu le rapport Payette dans son intégralité (mea culpa), mais comme un peu tout le monde, j’ai saisi certains passages qui furent publiés dans les médias.  Et à lire ceux-ci, tout porte à croire que madame Payette n’y va pas avec le dos de la main morte, comme dirait l’autre; cet article du site web du quotidien Le Soleil nous dit d’ailleurs que selon madame Payette, “Il y a un régime de peur dans la région de Québec”.

Les réactions furent nombreuses, et rapides; entre autres, l’Université Laval, où oeuvre madame Payette, s’est rapidement dissociée du rapport de sa professeure.  Et au travers de tous les avis négatifs lus et entendus au sujet de ce rapport, il y a eu quelques commentaires positifs, comme celui de Jean-François Vallée, de Saint-Philippe-de-Néri, qui fut publié ce matin sur le site web de La Presse.  Pour info, Saint-Philippe-de-Néri se trouve, à vol d’oiseau, à environ 125 kilomètres de Québec, et que dans le cadre de mon travail, quand je passe sur l’autoroute 20, à la hauteur de la sortie 456, il y a déjà belle lurette que je ne capte plus les radios de Québec, ce qui me porte à croire que ce gentil commentateur se fie sur de vieilles opinions (il dit avoir vécu dans le grand Québec pendant 38 ans), ou sur des préjugés.  À sa défense, au sujet des idées véhiculées par les gens de Québec, il nomme le fait de faire la file au Centre Vidéotron, ce qui indique peut-être que son déménagement dans le Bas-du-Fleuve est somme toute très récent.  À moins qu’il se tape quotidiennement l’écoute de ces stations de radio sur leurs sites internet respectifs, ou encore qu’il fasse l’aller-retour quotidiennement entre son domicile et la vieille capitale.

Quoi qu’il en soit, les habitués du Blogue me voient déjà venir!  Eh oui, je reproduis ici le commentaire de monsieur Vallée, tel que publié dans La Presse, et je répondrai entre les lignes (entre les paragraphes, en fait) en mettant mes propres commentaires, en réaction à ceux de monsieur Vallée.  Comme celui-ci me semble un souverainiste fini, je mettrai donc son texte en bleu, et je répondrai avec la couleur habituelle.  Allons-y!

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Madame Payette frappe dans le mille

Jean-François Vallée
Saint-Philippe-de-Néri, Québec

Madame Payette, les constats que vous dressez sur le contenu des émissions des radios de Québec touchent leur cible. Les réactions des principaux concernés les démasquent une fois de plus : elles sont dignes de voyous de ruelles rompus à l’intimidation. Ils attaquent en bande : « Allez, crient-ils, toute la gang ensemble, on lui pète la gueule ! » Une belle unité stalinienne lie les Fillion, Maurais, Dupont, Napoli, Bouchard, Ségal et Landry, qui n’ont même pas lu votre étude.

Premièrement, comment peut-il affirmer que tous ceux qu’il nomme n’ont effectivement pas lu le rapport?  Ils lui ont dit personnellement?  S’il s’accorde le droit de défendre ses couleurs, pourquoi les animateurs visés ne pourraient-ils pas défendre les leurs?  C’est là une simple manifestation de la liberté d’expression, comme d’ailleurs celles de l’Université Laval, du maire de Québec, d’Agnès Maltais, et aussi… de PKP, qui est lui-même régulièrement invité à au moins l’une de ces radios.

Le pire est que vos propos sont modérés. Le portrait s’avère en réalité encore plus sombre.

Ça, je ne pourrais dire, n’ayant pas lu le rapport moi-même.  J’accorde donc à monsieur Vallée le bénéfice du doute.

La vérité, c’est que les radios de droite à Québec enveniment vraiment le climat social de Québec. J’y ai vécu 38 ans, assez pour constater que les boycotter est inutile : leur fiel s’immisce dans tous les endroits publics, colore toutes les conversations. Il suffit d’écouter les passagers de l’autobus ou la station syntonisée par le chauffeur, de magasiner à Place Laurier ou de faire la file au Centre Vidéotron pour reconnaître les raisonnements spécieux et fallacieux entendus à la radio et recrachés tels quels, sans filtre. Petit à petit, l’incivilité, l’anti-féminisme, l’homophobie et le climato-scepticisme s’immiscent dans les esprits et teintent les propos.

Réglons une chose tout de suite, si vous le voulez bien; qui est ce monsieur Jean-François Vallée pour prétendre détenir ce qu’il appelle “la vérité”?  Ce qu’il raconte ici, et tout au long de son texte dopinion, n’est que sa propre interprétation de la situation.  Ensuite, pour prétendre que “les raisonnements spécieux et fallacieux entendus à la radio” soient effectivement “recrachés tel quels, sans filtre”, il faut bien entendu avoir écouté “les radios de droite à Québec” soi-même, ce que monsieur Vallée ne nous prouve en aucune façon.  Finalement, si l’incivilité, l’anti-féminisme, et l’homophobie sont des idées dont les frontières sont habituellement bien définies, j’aimerais bien savoir ce que le climato-scepticisme vient faire là-dedans, et ce pour la simple et bonne raison que les théories sur les changements climatiques ne sont encore que des théories, et que rien n’a été prouvé hors de tout doute raisonnable.  Comme on le dit souvent, si c’était vrai, ça se saurait!

La vérité, c’est qu’il n’existe aucun contre-discours crédible sur les ondes de Québec : les droitistes forment un troupeau uni qui monopolise les micros.

Il n’en tient qu’à monsieur Vallée de créer ce contre-discours!  Il n’a qu’à faire comme les autres, c’est à dire demander une licence, et ouvrir une station de radio qui émettra sa propre opinion.

La vérité, c’est qu’aucun indépendantiste ou « gauchiste » n’a passé le test d’embauche dans ces trois radios depuis des décennies, alors qu’au moins 50 % des gens de Québec partagent ces idées. Sylvain Bouchard peut donc dormir tranquille, il ne perdra jamais sa job.

Heureux d’apprendre “qu’au moins 50% des gens de Québec partagent ces idées” indépendantistes ou gauchistes; c’est probablement pour cela que la région de Québec est la seule au Canada où les conservateurs ont fait des gains appréciables lors des élections fédérales du 19 octobre dernier, et que le Bloc québécois, comme le Nouveau parti démocratique (NPD), d’ailleurs, n’y ont fait élire personne!

La vérité, c’est qu’à Québec, les clones d’Elvis Gratton ont pris le contrôle du crachoir et envoient paître systématiquement tous ceux qui ne pensent pas comme eux.

Encore une fois, si monsieur Vallée veut prendre “le contrôle du crachoir”, il sait quoi faire!

La vérité, c’est que ces animateurs sont les émules et les descendants de grand-papa André Arthur, qui a patiemment semé son style empoisonné non seulement à Québec, mais aussi à Saguenay (Myriam Ségal), Montmagny et Rivière-du-Loup (Daniel Saint-Pierre), où il tient chronique.

Il reste que les auditeurs, qu’ils soient à Québec, à Saguenay, à Montmagny, à Rivière-du-Loup ou ailleurs, ont le libre arbitre; s’ils ne sont pas contents de ce qu’ils entendent, ils peuvent toujours changer de station, s’abonner à la radio satellite, écouter des disques compacts, bref, les options sont nombreuses!

La vérité, c’est que ces animateurs connaissent très bien le poids des mots et les font servir à leurs fins. Connotés négativement : « syndiqué », « séparatiste », « péquiste », « québécois », « francophone », « gauchiste », « intellectuel » et « environnementaliste ». Leurs préférés : « environnementeur » ou « enverdeur ».

J’ai lu certains textes écrits par des personnalités connues pour leur côté vert, et j’ai moi-même ajouté à mon vocabulaire les mots “environnementeur” et “enverdeur”, tellement leurs propos étaient souvent tirés par les cheveux!  Encore une fois, on sent que l’auteur de ce texte associe l’environnement à la gauche, ce qui est loin d’être absolu!

Connotés positivement : « travailleur non syndiqué », « fédéraliste », « libéral », « canadien », « anglophone », « conservateur », « militaire », « caquiste » et « pétrole ».

De la façon dont je lis cette phrase, et la précédente aussi, il semble que monsieur Vallée connote lui aussi ces mots, mais de façon diamétralement opposée.  C’est son choix, si tel est le cas.

La vérité, c’est que ces radios sont, sur le plan politique, le bras médiatique des partis fédéralistes de droite. En 2014, c’était le Parti libéral du Québec. En 2015, le Parti conservateur du Canada. Leurs idées sont louangées et leurs élus acclamés, jouissant du privilège d’entrevues mielleuses, complaisantes.

D’abord, il est aussi vrai de dire que le Parti libéral du Québec est de droite que de dire que le drapeau du Québec est noir, avec des flammes orange!  Ensuite, il faut savoir que dans les médias, ça se passe comme ça; les propriétaires (ou les syndicats, dans le cas de Radio-Canada) ont une opinion, et la poussent.  S’il y avait une radio dont le propriétaire est un péquiste fini, à Québec, il est très probable qu’Agnès Maltais – qui se dissocie elle aussi du rapport Payette – y tiendrait une chronique hebdomadaire, à défaut d’être quotidienne.  Pour information, mentionnons que PKP est régulièrement invité en entrevue à la radio québécoise dite de droite.

La vérité, c’est qu’il ne s’agit pas de radios d’opinions, mais de radios à une seule opinion, mur à mur.

Les radios d’opinions sont là pour être mises au défi; il n’en tient qu’à monsieur Vallée, ou à quiconque, de défier les animateurs, que ce soit au téléphone, ou sur la page Facebook de la station.  Là encore, les options sont nombreuses.

En fait, ils logent à l’enseigne des libertariens. Mais ça, ils ne l’avoueront jamais.

Là-dessus, je dirai que pour sa part, monsieur Vallée n’avouera jamais qu’il n’a aucune idée de ce qu’est réellement un libertarien.  Je ferai donc oeuvre de pédagogie, en espérant qu’il lise ceci.  Un libertarien, en une phrase, est un type qui frustre à la fois les conservateurs et les libéraux, en se déclarant en faveur de la libre circulation des armes à feu, afin de permettre aux couples gais de défendre leurs plants de marijuana!  Pour aller un peu plus profondément, je recommande ce billet, que j’ai écrit il y a de cela plus de 5 ans, et qui aide à bien situer sa position politique.  Le petit quiz qu’on y trouve n’a pas la prétention d’être parfait, loin de là, mais il permet de se faire une idée rapidement.

La vérité, enfin, c’est que ces radios sont si anglomanes et francophobes qu’on jurerait qu’elles se sentent investies de la mission de formater les Québécois en vue de leur assimilation dans l’Amérique anglophone. Tout ce qui est québécois leur est étranger, leur pue au nez. Ils dénigrent, voire haïssent tout ce qui se crée en français. À l’opposé, leur esprit critique disparaît devant tout ce qui vient de l’Amérique anglophone, dont ils embrassent et étreignent la culture.

Il y a une différence entre “formater les Québécois en vue de leur assimilation dans l’Amérique anglophone” et s’ouvrir à autre chose que l’exclusivement québécois 100% pure laine vierge!  L’attitude du gouvernement du Québec, depuis les années péquistes de René Lévesque, est de tenter d’assimiler les anglophones, ce qui n’est pas mieux, avouons-le!  Je crois sincèrement qu’il y a de la place pour la culture anglophone, que l’on peut écouter de la musique en anglais, par exemple, et ce sans pour autant renier notre langue et notre culture propres.  Aussi, le fait d’inonder le Québec de produits culturels 100% francophones n’ajoute pas de qualité à la production de cette culture.  On se retrouve ainsi coupés du monde extérieur, dans un bouillon de médiocrité, duquel sort parfois un produit d’exception qui sera malheureusement ignoré, parce que trop dilué.

Bref, pour renchérir sur le propos de Madame Payette, les animateurs de ces radios sont profondément aliénés, et irrémédiablement colonisés.

Ceci ne représente qu’une opinion personnelle, face à laquelle je laisse les personnes visées se défendre elles-mêmes.

Et même ceux qui voudraient les ignorer doivent subir quotidiennement cet affligeant spectacle.

Idem ici.  Comme je le disais plus tôt, de nombreuses options s’offrent à ceux et celles qui ne veulent pas entendre ce discours.

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Canada 2015: Salmigondis d’une longue, longue campagne

Bon, nous en sommes plus ou moins à mi-chemin de l’actuelle campagne électorale fédérale.  Est-ce que votre opinion politique a changé?  Avez-vous une vision différente de la politique fédérale, comparativement à avant le déclenchement des hostilités?

Dans mon cas, rien n’a changé.  C’est vrai, je l’avoue, que ma vision de la patente fédérale est enracinée depuis pas mal longtemps, et que rien de nouveau n’est venu influencer cette vision.  Que ce soit le retour de Gilles Duceppe à la tête du Bloc québécois, Justin Trudeau qui reprend à son style la thèse du 99% versus 1%, Thomas (ou Tom?) Mulcair qui parle des deux côtés de la bouche, ou Stephen Harper qui pacte ses points de presse avec des partisans, le cirque de la politique fédérale, à mes yeux, a des airs de déjà vu.  Sur le dernier thème abordé, soit celui de la crise des migrants syriens, c’est presque la course à savoir qui accueillera le plus de familles syriennes chez lui. C’est du moins ce que laisse transparaître le discours des chefs d’opposition, alors que celui du premier ministre sortant privilégie plutôt le souci de la sécurité.

C’était tellement drôle d’entendre à la radio, cette semaine, Justin Trudeau dire que son père avait lui-même fait en sorte que le Canada ouvre ses frontières à des milliers de réfugiés, alors que d’autres ont même évoqué Joe Clark, dans le dossier des “boat people”, à la fin des années 1970.  D’abord, il faut spécifier que les laotiens, mais surtout vietnamiens, fuyaient une dictature violente.  Ensuite, il n’y avait aucun terrorisme au Vietnam, à cette époque, donc aucun danger de laisser entrer des terroristes qui allaient organiser de potentiels attentats à partir de chez nous.  Le cas syrien est très différent; les réfugiés fuient la situation ambigüe qui règne là-bas, à savoir d’un côté la dictature de Bachar el-Assad, et de l’autre la violence du groupe État islamique.  Rien ne garantit que parmi les gens qui fuient, aucun n’appartient à l’une ou l’autre de ces deux organisations.  Bref, bien des choses viennent brouiller les cartes, et empêcher de comparer directement les deux époques.

D’autre part, en ce qui concerne les sondages, il ne faut pas prendre une potentielle défaite des conservateurs pour acquise; dans le Journal de Montréal d’hier, je lisais qu’un sondage Ekos replaçait les tories au premier rang, devant le NPD, puis les libéraux.  Mais les chiffres des différents sondages nous confirment que nous sommes dans une véritable lutte à trois, à travers le pays.  Les conservateurs sont forts dans l’ouest, et en Ontario, les néodémocrates le sont au Québec, et en Colombie-Britannique, alors que les libéraux sont forts dans les Maritimes.  Bref, la lutte s’annonce serrée, et bien malin sera celui qui prédira le résultat de la prochaine élection.  D’autant plus que dans une campagne aussi longue que la présente, toutes sortes de revirements peuvent survenir.

Parti québécois: Pourquoi Noëlla Champagne ne sera pas ministre

La nomination, par Pauline Marois, et la présentation du Conseil des ministres du nouveau gouvernement du Parti québécois (PQ), mercredi dernier, n’ont pas fait que des heureux.  Si, du côté des environnementalistes, l’accession de deux de leurs radicaux, en Martine Ouellet (Vachon) aux Ressources naturelles, et Daniel Breton (Sainte-Marie–Saint-Jacques), à l’Environnement, les a fait jubiler, de celui de la Mauricie, les festivités ont plutôt fait place à la colère.  Alors que trois élus de la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, pour ne citer que cet exemple, sont passés au Conseil des ministres (Stéphane Bédard, dans Chicoutimi, au Conseil du Trésor, Alexandre Cloutier, dans Lac-Saint-Jean, aux Affaires intergouvernementales canadiennes, et Sylvain Gaudreault, dans Jonquière, aux Transports et aux Affaires municipales), ni l’un, ni l’autre des deux élus péquistes de la Mauricie n’est parvenu à accéder aux saint des saints.

Si l’on comprend que Luc Trudel, dans Saint-Maurice, en soit à sa toute première élection à titre de député, il en est tout autrement de Noëlla Champagne, qui entame son troisième mandat, et son deuxième consécutif, comme députée de Champlain.  Elle occupe le siège depuis 2003, à l’exception du passage éphémère de l’adéquiste – devenu libéral – Pierre-Michel Auger, mais patauge dans la politique depuis environ 25 ans.  D’abord conseillère municipale à Saint-Louis-de-France, de 1988 à 1997 (ville fusionnée à Trois-Rivières en 2002), elle est passée au Bloc québécois, puis au PQ, d’abord à titre de directrice d’organisation, puis d’attachée politique du député péquiste Yves Beaumier, pendant six ans.  Bien au fait des dossiers locaux, elle fut donc toute désignée pour le relever, lors de l’élection de 2003, où elle sauvegarda le siège au PQ, malgré l’arrivée des libéraux au pouvoir, exploit qu’elle a répété en 2008.  Bref, tout chef consciencieux, à défaut de la placer dans son top-3, aurait à tout le moins considéré la candidature de madame Champagne au Conseil des ministres, ne serait-ce que pour un poste de whip.

Mais cela ne s’est pas produit.  Et voici pourquoi.

En politique, il existe deux sortes de députés.  La première, dont le nombre est en progression lente, mais constante, est celui de ce que l’on pourrait considérer comme des élitistes.  Issus de familles riches, de professions libérales ou individus bien en vue dans leur organisation, ils sont souvent considérés comme incontournables, lorsque vient le temps de procéder à des nominations, et ce davantage pour une question d’image que de compétences, celles-ci étant parfois plutôt limitées.  En Mauricie, pensons à Djemila Benhabib, dans Trois-Rivières, ou encore à Patrick Lahaie, dans Maskinongé, candidats parachutés qui ont tous les deux mordu la poussière.  La deuxième, que l’on voit malheureusement de moins en moins, sont issus de milieux locaux; des gens d’affaires en région, des personnes issues de la politique municipale, ou encore du milieu socio-communautaire.  On les voit très peu, devant les caméras; si la plupart ont des compétences, sinon une connaissance de leurs dossiers, à toute épreuve, ils ont aussi, parfois, un franc-parler qui détonne avec la “langue-de-bois”, désormais omniprésente, en politique, et dont l’élite ne peut plus se passer.

Je n’ai jamais rencontré Noëlla Champagne, mais je sais qu’elle fait partie de la seconde catégorie, comme les Jacques Brassard, Guy Chevrette, et autres Yvon Picotte de ce monde.  Mais à l’image de Bernard Landry, Pauline Marois, malgré ses origines modestes, fait désormais partie de la première.

Le problème, c’est que les gens de la première catégorie regardent trop souvent ceux de la seconde, comment dire, “du haut de leur hauteur”; ils les considère trop souvent comme des gens qui n’ont pas suffisamment évolué, en politique, contrairement à eux.  Et ils ont aussi tendance à les “enlever de leur chemin”, lors qu’ils accèdent aux plus hautes fonctions.  Cette tendance est particulièrement présente au PQ; on se souviendra des démissions fracassantes de Guy Chevrette, et de Jacques Brassard, à qui Bernard Landry, lorsque celui-ci a pris la relève de Lucien Bouchard, a offert des ministères moins importants.

Dans le cas présent, les considérations qu’avait Pauline Marois pour Jean-François Lisée, et Pierre Duchesne, deux “joueurs d’arrière-scène” du parti, issus du journalisme, à qui elle a probablement offert elle-même des circonscriptions sûres, étaient trop fortes, et ne permettaient pas d’accueillir une roturière au sein du Conseil des ministres.  Il faut dire que contrairement à ce qu’on exige des députés de la deuxième catégorie, s’ils veulent s’assurer une carrière longue et fructueuse, Noëlla Champagne est de celles qui ne restent pas silencieuses; dans certains dossiers locaux, elle a pris des positions, et les a maintenues contre vents et marées.

Et c’est pour ça, selon moi, qu’elle devra retourner au caucus des députés en regardant par terre; à mon point de vue, ce n’est pas demain la veille qu’elle prendra place au Conseil des ministres. À moins que, de par son boycott du caucus, elle suive les traces des étudiants.  Reportera-t-elle un jour son carré rouge?

Politique… en rafale! (ou les commentaires d’un chiâleux notoire)

Bon, c’est vrai que cela fait un sacré bout de temps que je n’ai pas consacré un véritable article sur la politique.  C’est que, voyez-vous, je fus pris d’une énorme lassitude; j’avais l’impression de toujours répéter la même chose.  Que ce soit au provincial, au fédéral, sur la gauche ou sur la droite, il me semblait que j’écrivais sans cesse les mêmes mots, les mêmes phrases.

Alors en ce dimanche, je me permets une rafale de politique.  Pour ceux et celles qui n’aiment pas, rassurez-vous; ça durera le temps d’un seul billet!

Commission d’enquête sur la construction

Pendant deux ans et demi, le gouvernement de Jean Charest a toujours contourné la question d’une éventuelle commission d’enquête, sur l’industrie de la construction, les allégations de collusion et de corruption qui s’y rattachent, et sur les liens de tous ces acteurs avec les partis politiques.  Avec le temps, certaines mesures furent mises en place, comme une unité anti-collusion (UAC), puis une autre unité, permanente, celle-là, contre la corruption, l’UPAC, laquelle allait englober, à terme, les activités de l’UAC.  Cette dernière était dirigée par l’ancien chef de la police de la ville de Montréal, Jacques Duchesneau, alors que l’UPAC était sous les ordres de Robert Lafrenière, un ancien de la Sûreté du Québec (SQ).  Comme l’UAC allait éventuellement passer sous l’égide de l’UPAC, il est clair que Duchesneau, un “bleu”, allait passer sous les ordres de Lafrenière, un “vert”.  Or, depuis que le système policier actuel existe, chez nous, il y a toujours eu une sorte de guerre, entre les “bleus”, du monde municipal, et les “verts”, soit les policiers provinciaux.  J’y reviendrai.

Or, voilà qu’un important rapport de l’UAC s’est retrouvé – allez savoir comment, mais surtout pourquoi – coulé dans les médias!  Il n’en fallait pas plus pour que le bon peuple – poussé dans le dos par les médias, et plus particulièrement celui qui a coulé le rapport – prétende que “la vérité”, c’est que Duchesneau exige, lui aussi, une commission d’enquête!  Dans les faits, Duchesneau ne l’exige pas.  Il dit plutôt que si enquête il y a, celle-ci devrait comporter un important volet à huis-clos, chose qu’il a d’ailleurs confirmé en commission parlementaire, lors de son témoignage, qui a duré 5 heures.  Il a expliqué qu’à huis-clos, un témoin potentiel peut parler pendant des heures, et des heures, alors que devant les caméras, il peine à se rappeler de son propre nom!  Il a constaté cet état de fait depuis aussi loin que la Commission d’enquête sur le crime organisé (CECO), en 1973!

Suite au coulage de son rapport dans les médias, Duchesneau est passé parmi ceux-ci, pour des entrevues en tous genres.  Parmi celles-ci, un passage à “Tout le monde en parle”, lors duquel il avance que l’UPAC, “c’est pas fort!”  Il n’en fallait pas plus pour que le boss de l’UPAC, le vert Lafrenière, convoque le bleu Duchesneau à son bureau, au début de la semaine suivante.  S’en suivit une “absence” de Duchesneau, autant du travail que des médias, absence qui s’est conclue, dernièrement, par la résiliation du contrat de Duchesneau.

À mes yeux, il est clair que Duchesneau a été viré pour avoir dit que l’UPAC, c’est pas fort, dans un show regardé par plus ou moins un million et demi de téléspectateurs par semaine.  Mais sur Twitter, on l’a vu d’un tout autre oeil; Duchesneau, “l’homme du peuple”, a été cavalièrement viré par Lafrenière, “l’homme de Charest”!  On y prétendait même que la SQ n’était rien de moins qu’une “police politique”, ce qui m’a amené à dire à plusieurs qu’ils lisaient trop de romans policiers!

Dans les jours qui ont suivi, le premier ministre a procédé à l’annonce d’une commission d’enquête, laquelle prendra une forme non-conventionnelle, compte tenu des tenants et aboutissants de ce secteur particulier qu’est la construction.  La présidence de la commission a été confiée à la juge France Charbonneau, dont la nomination a été recommandée par le juge-en-chef de la Cour supérieure.

Depuis, quelques ajustements ont été effectués, dans les jours suivant l’annonce, à ce que d’aucuns appellent “la patente”, parce qu’ils ne veulent pas coller le nom de “commission” à ce que Charest a annoncé, et celui-ci a également dit, devant l’éventuel besoin de nouveaux ajustements, que la juge Charbonneau n’avait qu’à faire ses demandes.  Et voilà qu’on se plaint, maintenant, du silence radio de la juge Charbonneau, depuis sa nomination, et que, ce faisant, elle serait de mèche, elle aussi, avec Charest.

Mon point de vue, là-dessus, c’est que Charest est le bouc-émissaire pour tout ce qui ne se passe pas au goût d’une certaine élite de gauche, et que celle-ci fait porter ce message à l’ensemble de la population.  Dans les faits, pourquoi la juge Charbonneau garde-t-elle le silence, pour l’instant?  Simple; elle doit d’abord se trouver deux assistants-commissaires.  Elle doit ensuite mettre en place les façons de faire de la commission; il faut trouver des procureurs, du personnel de soutien, des locaux, désigner qui doit témoigner à huis-clos, qui doit témoigner en public, comment procéder, bref, plein de choses qu’il faut mettre en place avant de convoquer le premier témoin.  Vous croyez que tout cela se fera en deux jours et demi?  Je suis d’avis que les premiers témoins ne se feront pas entendre avant 2012!  D’autant plus que la commission a deux ans pour remettre son rapport, sans compter d’éventuels prolongements de mandats!

L’objectivité de la Société Radio-Canada

Ceux qui croient que la Société Radio-Canada (SRC) est tout à fait objective, dans son travail journalistique, comparativement aux autres médias, n’ont qu’à regarder l’émission “Les coulisses du pouvoir”, animée par la non moins objective Emmanuelle Latraverse.  Un usager de Twitter a même dit, la semaine dernière, que la SRC devrait changer le titre, “Les coulisses du pouvoir”, par un autre, “Les câlisses de Conservateurs”, tellement les membres du panel de journalistes, comme l’animatrice, et les autres invités, y vont continuellement de charges à fond de train contre le gouvernement du Stephen Harper.  D’ailleurs, je mets quiconque au défi de m’envoyer un lien où l’animatrice dit un tant-soit-peu de bien du gouvernement conservateur.  J’attends vos envois!

En plus, cette semaine, on a eu droit à une émission “Enquête” qui portait, en grande partie, sinon en entier, sur le cas de Québécor, le grand concurrent privé de la SRC.  Pas que la firme de Pierre-Karl Péladeau soit elle-même un exemple d’objectivité, mais je trouve bizarre qu’une société payée par nos impôts, à raison de plus d’un milliard de dollars par année, se drape de la blancheur de l’objectivité, et vienne faire un reportage sur un concurrent qui, dénonce-t-elle, reçoit des fonds publics, et oriente, en quelque sorte, son service de l’information vers ses propres intérêts.  Surtout quand cette société publique omet de dire que ce concurrent reçoit des sommes à partir d’un fonds dont elle retire, elle aussi, des parts.  Bref, la guerre est pognée entre la SRC et PKP!

À mes yeux, aucun diffuseur, au Canada, ne peut se proclamer le gardien de l’objectivité!  Tous les journalistes reçoivent un chèque de paye, et chaque payeur exige de son personnel de faire le travail à sa façon.  Ainsi, tous les journalistes ont un certain biais, face à l’information qu’ils diffusent, en faveur de leur boss respectif.  De plus, tous les diffuseurs ont une, ou plusieurs vedettes, qui font un travail d’analyse, sur ladite nouvelle, et la rendent dans le sens que leur boss respectif la voit, ou que celui-ci voudrait que le public la voit.  La tâche de ceux qui regardent est de prendre les infos des uns, et des autres, et d’aller chercher la vraie nouvelle, là-dedans.  Malheureusement, bien peu de gens se donnent cette tâche!

La “non-crise” au Parti québécois

Depuis juin dernier, le parti québécois (PQ) est secoué par une crise à l’interne – une autre!  Encore une fois, on s’en prend au chef, jusqu’à ce que celui-ci démissionne.  En fait, le leadership de Pauline Marois est contesté depuis bien avant juin!  Mais la victoire de son parti, malgré qu’elle soit “sur les fesses” (par seulement 196 votes), lors de la partielle dans Kamouraska-Témiscouata, lui a donné un sursis, et le vote de confiance qu’elle a obtenu, lors du congrès du PQ d’avril dernier, le premier en six ans, est venu la réconforter.  Sauf que cette fois, le scénario de crise ne se déroule pas comme prévu; la chef n’entend pas lancer la serviette comme ça!  Elle se dit bien en selle, et fait part à qui veut l’entendre qu’elle sera toujours la chef, lors du prochain scrutin général!

Or, le réconfort d’un vote de confiance, fusse-t-il historiquement élevé, demeure éphémère, dans ce parti; moins de deux mois après son vote de confiance, trois députés, Pierre Curzi, Lisette Lapointe et Louise Beaudoin, démissionnent du caucus du PQ, et deviennent députés indépendants.  Le lendemain, Jean-Martin Aussant fait de même, puis Benoît Charette les suit, deux semaines plus tard.  Puis, ces derniers jours, nouvelle fronde, lors d’une interminable réunion du caucus du PQ, lors de laquelle on demande carrément la démission de Pauline Marois!  Mais à part quelques exceptions, sur Twitter, pour les partisans du PQ, il n’y a pas de crise, et tout va très bien, madame la marquise!

À mon avis, les troupes du PQ ont été stigmatisées par la débandade du Bloc québécois, face au Nouveau parti démocratique (NPD) de feu-Jack Layton, lors des élections fédérales du 2 mai dernier, et ont peur de subir le même sort.  D’ailleurs, le fait que le PQ courtise l’ancien chef du bloc, Gilles Duceppe, ne fait que jeter un nuage de fumée qui tente, tant bien que mal, de camoufler la situation de crise que vit le parti, pour la énième fois de son histoire.  Je suis d’avis que le travail de Gilles, combiné aux efforts de l’autre souverainiste de profession, Gérald Larose, avec ses éventuels états généraux, viendront à bout de la crise… et du parti!