Réseau routier: Avez-vous remarqué que le “chaînon manquant” est toujours au Québec?

Souvent, quand on veut planifier un voyage, que ce soit pour le travail ou pour le plaisir, sur le réseau routier nord-américain, il arrive souvent que ce que l’on pourrait qualifier de “chaînon manquant”, c’est à dire une courte section d’un itinéraire autoroutier, par exemple, qui n’est qu’une “super-2”, ou pire encore, une route de campagne, ou bien une belle route asphaltée qui comporte quelques sections en gravier, ou en terre battue, ces chaînons manquants, donc, sont situés au Québec.

Le ministère des transports du Québec (MTQ) est en train de remédier à quelques situations, mais il demeure clair que plusieurs de ces améliorations mériteraient d’être complétées. Voici quelques exemples de routes à améliorer, ou carrément à construire, pour rendre le réseau routier global plus homogène.

Quand il est question de traverser le Canada, on parle souvent d’une autoroute – digne d’une Interstate américaine – qui relie Toronto et Halifax. Évidemment, elle n’est pas complète; il en manque une vingtaine de kilomètres, environ, situés au Québec. Je parle de l’autoroute 85, qui est d’ailleurs en chantier, et dont les travaux, d’abord prévus pour se compléter en 2025, s’étaleront jusqu’aux portes de 2027. En effet, le panneau annonciateur des travaux de la section 7 indique que ceux-ci auront lieu de septembre 2022 à décembre 2026. En plus de la section 7, les travaux se poursuivent sur les sections 4 et 5, quoiqu’au ralenti d’ici la fin de l’hiver. Les sections 1, 2, 3 et 6 sont déjà complétées, et malgré quelques ratés ici et là, sont très agréables à utiliser.

L’autre grand chantier sur lequel on comble un chaînon manquant est celui de l’autoroute 35, qui complètera le lien autoroutier Montréal – Boston. Il manquait quelque 35 kilomètres, entre Saint-Jean-sur-Richelieu et la frontière du Vermont, et de ceux-ci, une vingtaine ont été complétés en 2014, soit jusqu’à la route 133, à Saint-Sébastien. Les travaux vont bon train sur la section située entre Saint Sébastien et Saint-Armand – autrefois Philipsburg, où la future autoroute 35 se raccordera à l’actuelle route 133; le point de résistance est le pont de la rivière aux Brochets, mais ça avance. Une dernière section, soit la route 133 elle-même, qui sera transformée en autoroute, sur environ 4,5 kilomètres, entre l’échangeur du chemin Champlain et la frontière, est en phase de planification. S’il est inscrit sur la liste de projets inclus dans la loi 66 (Loi d’accélération de certains projets d’infrastructures), adoptée suite à la pandémie de COVID-19, il n’est pas dit qu’il se réalisera très rapidement; cette section de route est déjà à 4 voies divisées sur deux chaussées distinctes, et il ne restera donc qu’à ajouter des ponts d’étagement ici et là, en plus de l’échangeur de l’avenue Montgomery et de quelques autres ajustements. L’autoroute 35 sera vraiment complétée lorsque l’on construira l’échangeur de Saint-Alexandre, qui sera probablement la sortie 26 ou 27, mais pour ce faire, il faudra construire une section de la route 227 dans l’axe de la montée des Soixante, et raccorder le tout à la montée de la Station, en plus de quelques améliorations, dont l’intersection de celle-ci au rang des Dussault, qui constitue l’actuelle route 227, le tout dans le but d’assurer une certaine fluidité à la circulation.

Un autre chaînon manquant consiste en une amélioration de route, et j’ai nommé la route 389, qui relie Baie-Comeau à Labrador City, dans la province voisine de Terre-Neuve-et-Labrador. Le problème de cette route, c’est que certaines sections ont été construites sans véritables plans, et ne sont qu’une piste en terre battue; il arrive souvent que ces sections soient carrément fermées, au printemps, lors du dégel, question d’empêcher les camions lourds de s’embourber, et de détruire ce semblant de route. Encore là, le MTQ a entrepris des travaux il y a plusieurs années, sur 5 sections différentes de la route, et plusieurs sont complétés, mais le gros morceau s’en vient, à savoir la reconstruction de la route entre les kilomètres 478 et 566, soit entre Fire Lake et Fermont. Sur cette distance, seuls les kilomètres 496 à 507 seront rénovés; tout le reste sera du neuf. On prévoit retrancher près de 19 kilomètres avec le nouveau tracé, dont le déboisement est complété. Les travaux de la troisième partie (km 507 à 566) ont été attribués à la compagnie Dexter Québec, et un appel d’offres pour la surveillance des travaux de cette partie est prévu ce printemps.

Ce dernier projet permettra enfin de relier Terre-Neuve-et-Labrador au reste de l’Amérique du Nord avec une route décente, compte tenu que la Trans-Labrador Highway (NL-500 et 510) est maintenant pavée sur toute sa longueur. Mais il y a un autre projet, tout aussi gigantesque, qui pourrait être complété, et qui sauvera non pas 19 kilomètres, mais presque trois jours de voyage; la construction de la route 138 entre Kegaska et Vieux-Fort, en Basse-Côte-Nord. Il faudra faire une route de presque 400 kilomètres là où il n’y a absolument rien, à part quelques villages épars ici et là. Bien sûr, pour compléter le tout, il faudra aussi construire deux liens fixes majeurs, soit entre l’île de Terre-Neuve et le Labrador, et entre les deux rives de la rivière Saguenay, deux liens actuellement assurés par des traversiers, et pour lesquels des études ont été effectuées depuis des années. Le MTQ a bien un projet pour compléter la route 138, mais c’est ce genre de projet que je ne verrai pas de mon vivant; on réalise quelques kilomètres, ici et là, mais il n’y a pas de quoi téléphoner à sa mère. Ce projet est important non seulement pour les moins de 10,000 québécois et autochtones qui vivent le long du littoral du Saint-Laurent, mais aussi des quelque 480,000 habitants de l’île de Terre-Neuve qui pourraient bénéficier d’un premier lien fixe avec le reste de l’Amérique du Nord.

Évidemment, il y a d’autres projets à considérer, mais beaucoup de ces chaînons manquants, qui restent à construire, sont juste à nos portes; on parle de divers ponts – ou tunnels – et voies rapides dans diverses villes d’importance, au Québec. Dans le grand Montréal, ils sont nombreux, un nouveau pont à l’est de l’île de Montréal, demandé dans le rapport Nicolet, publié il y a 20 ans, rapport qui ramasse de la poussière dans les sous-sols du Parlement de Québec, et le prolongement de l’A-640 dans l’ouest, vers l’A-40, question de boucler la boucle d’une première véritable autoroute périphérique autour du grand Montréal. Avec les travaux du tunnel Lafontaine, ce pont dans l’est, s’il avait été construit, démontrerait toute son utilité. Et l’on vivra un scénario semblable dans l’ouest, lorsque les travaux du nouveau pont de l’Île-aux-Tourtes, ou peu importe le nom qu’on lui donnera, commenceront; une 640 complétée jusqu’à Hudson, ou dans les environs, donnera un bon coup de main. La réfection de la Métropolitaine (A-40), constamment repoussée, devra bien être mise en chantier un jour ou l’autre, avant qu’elle ne tombe en ruines; ce jour-là, une 440 reliée à la 40 à ses deux extrémités pourrait s’avérer fort pratique, de même qu’une autoroute Ville-Marie (QC-136, ex A-720) raccordée à l’A-25, créant ainsi deux voies de détour qui donneraient un peu d’air à la circulation dans le secteur.

Malgré les haut-cris de nos bienveillants environnementalistes, tout ne peut pas passer par le métro, ou par le REM, qui retarde son ouverture de six mois en six mois. Les voitures électriques, qui sont l’avenir du transport, selon certains, devront aussi rouler quelque part. Par ailleurs, comme la téléportation des marchandises n’est pas pour demain, ni pour après-demain, les camions devront aussi circuler. De là le besoin d’un réseau routier de qualité, qui dessert tous les coins du Québec.

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Route 138 sur la Côte-Nord: On vise quoi, au juste?

Il m’est arrivé de parler de la route 138, entre disons Havre-Saint-Pierre et Blanc-Sablon, dans la région de la Côte-Nord.  Ces derniers jours, je me suis rendu moi-même au bout de la route 138, à Kegaska, pour voir de mes yeux la route en question.  Évidemment, le temps et le budget m’ont empêché de m’attarder plus longtemps – et de prendre des photos – dans le secteur, mais j’ai pu constater de visu que le prolongement de la route 138, à tout le moins jusqu’à maintenant, ne suit aucun plan établi à l’avance.  On se contente de raccorder les villages les uns aux autres, sommairement, puis on reporte les améliorations à plus tard.

Si l’on souhaitait vraiment une route capable de supporter le développement de la région, et éventuellement son raccordement au réseau routier de la province voisine de Terre-Neuve-et-Labrador, on y aurait mis beaucoup plus de sérieux.  Je dois spécifier qu’à plusieurs endroits, mises à part quelques courbes prononcées dues aux difficultés du terrain, la route 138, à l’est de Sept-Îles, est en général une route plutôt rapide, que l’on améliore au fil des besoins.  Mais que s’est-il passé entre Aguanish et Natashquan?  Une véritable “trail à vaches” où les courbes à 75, 65, voire 55 km/h se succèdent à qui mieux mieux, alors qu’à l’est de la patrie de Gilles Vigneault, si l’on exclut la courbe à 35 km/h à l’entrée de Nutashkuan (la réserve autochtone que l’on appelle encore Pointe-Parent), la route 138, dont les 45 derniers kilomètres sont en gravier, est large et dégagée, et les courbes y sont longues et prévisibles.  C’est à croire que sur ces 25 kilomètres de route, entre Aguanish et Natashquan, on s’est contenté de mettre de l’asphalte sur une piste de quad.  D’autant plus que la route n’a pas l’air très solide.

Le MTQ devrait établir un plan de travail dans lequel on considère la route 138, pourquoi pas, comme un éventuel nouveau tronçon de l’autoroute 40 en devenir.  On réalise ensuite les tronçons en fonction des endroits à relier, puis on y raccorde les villages.  Parce que tel que c’est présentement, le jour où Terre-Neuve-et-Labrador décide de relier l’île de Terre-Neuve au continent par un lien fixe, ce qui pourrait se réaliser à travers un grand projet financé par le gouvernement fédéral, le Québec devra recommencer sa route 138.  Parce que, comme je le disais, si certains tronçons de la route sont très bien, d’autres ne tiendront jamais le coup.

Ma première réplique à Madeleine Pilote-Côté

J’aime bien, vous le savez, répliquer à un texte paragraphe par paragraphe.  Comme cela fait un sacré bout que je n’ai pas commis l’exercice, l’idée de le faire m’est venue aussitôt que j’ai lu le texte de la dernière recrue du Journal de Montréal, Madeleine Pilote-Côté.

Diplômée de l’école nationale de l’humour, elle s’était inscrite à un concours intitulé “Les novices”, qui visait à faire connaître aux lectorat du Journal de Montréal de nouveaux chroniqueurs d’opinion.  Et comme elle a remporté le concours, on voit de ses textes, à l’occasion, dans les pages d’opinion du quotidien montréalais.

Sa dernière colonne, parue dans l’édition papier de ce matin, m’a sauté aux yeux.  Bien entendu, je ne peux pas lui reprocher d’avoir une opinion. Au contraire; nous devrions tous, autant que nous sommes, suivre suffisamment l’actualité pour être capable d’avoir sa propre idée sur des sujets qui nous intéressent.  Par contre, et j’espère que ce sera le cas pour madame Pilote-Côté, le fait d’exprimer une opinion inclut aussi le fait que l’on doive s’attendre à ce que d’autres personnes aient une opinion contraire.

Allons-y donc! Le texte de Madeleine Pilote-Côté sera en couleur, alors que mes répliques seront en noir.

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L’homme blanc: d’un océan à l’autre

Présentement, au Canada, tous les premiers ministres des provinces sont des hommes blancs de plus de 45 ans. Allô la diversité.

C’est la victoire de Dennis King, mardi passé à l’Île-du-Prince-Édouard, et celle de Jason Kenney la semaine d’avant en Alberta qui ont tué mon espoir de voir mon pays représenté par une pluralité de visages. Dix provinces canadiennes, 10 premiers ministres baby-boomers blancs.

Évidemment, madame Pilote-Côté fait ce constat alors qu’il n’y a pas si longtemps, pas moins de 5 femmes occupaient simultanément la fonction de premier ministre de diverses provinces du Canada.

Pourquoi est-ce que je prends ces élections pour faire l’objet de ma chronique d’aujourd’hui ? C’est parce que je ne me sens pas représentée par ces dirigeants politiques. Quand je marche dans la rue, je vois un Canada coloré, féminin, masculin, homo, noir, métis… Pourquoi ne vois-je pas cette diversité sur la scène politique ? Je veux me voir, je veux nous voir, je veux être représentée par des gens qui sont à l’image de ce qu’est mon pays dans toute son hétérogénéité.

Mais les canadiens sont représentés par des gens qui sont à l’image de ce qu’est le Canada dans toute son hétérogénéité!  Pour l’heure, les premiers ministres des provinces sont tous des hommes blancs parce que ça s’adonne comme ça pour l’instant, mais lors des prochains scrutins, qui sait de quoi le portrait aura l’air.  Comme je l’écrivais plus tôt, il fut une époque pas si lointaine où 5 femmes étaient premières ministres; en effet, entre le 11 février 2013 et le 24 janvier 2014, Kathleen Wynne (première lesbienne déclarée, de surcroit) était en poste en Ontario, Christy Clark en Colombie-Britannique, Kathy Dunderdale en Terre-Neuve-et-Labrador, et Alison Redford en Alberta, sans oublier Pauline Marois au Québec, dirigeaient les destinées de leur province respective.

Diversité, où te caches-tu ?

Il y a à peine trois décennies, personne n’aurait souligné cet état de fait. Nous vivions alors dans une société où non seulement les femmes, mais aussi les minorités étaient sous-représentées. Aucune mesure n’était instaurée pour corriger le tir.

Dites-moi, madame Pilote-Côté, quel genre de mesure pourrait-on mettre en place pour obliger les gens à voter pour ceux – ou celles – qu’ils ne veulent pas voir en poste?

Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus à trouver que cela doit changer. À ressentir une « écœurantite », un « ça va faire ». À savoir que ces déclinaisons de Blancs qui nous sont proposées ne sont pas représentatives de la large palette des identités qui forment notre nation. Combien de temps allons-nous laisser les choses aller ? Surtout quand on sait qu’à ce rythme, c’est dans 106 ans que nous atteindrons la parité.

La meilleure façon de représenter une population donnée est encore de mettre sa face sur un poteau.  Je prendrai l’exemple ici de ma députée fédérale, Ruth Ellen Brosseau.  Elle a fait davantage parler d’elle, lors de sa première candidature, en 2011, à cause du voyage qu’elle a fait à Las Vegas, en pleine campagne électorale, et par son ignorance totale de sa circonscription (elle a avoué l’avoir trouvé via Google Maps!) que par son expérience politique, qui était alors nulle.

Une fois sa victoire confirmée, elle a eu une formation accélérée auprès de son parti politique, le NPD.  Ensuite, elle est allée voir son vis-à-vis provincial de l’époque, Jean-Paul Diamond, et lui a demandé les bons vieux “trucs du métier”, ce qu’il s’est fait un plaisir de lui donner.  En fait, cela se résumait en une phrase; “sois partout!”  Elle mit en pratique les conseils qu’elle a reçus, et lors de la campagne suivante, elle a battu son plus proche adversaire par plus de 8900 votes (de majorité!), alors que plus de la moitié des députés sortants du NPD, élus comme elle lors de la célèbre “vague orange”, ont carrément mordu la poussière.

Le programme de son parti est diamétralement opposé à ce que je recherche en politique fédérale, mais si je me retrouve en situation où je dois “voter l’homme”, comme on disait autrefois (c’est-à-dire voter pour la personne avant le parti), c’est clair qu’elle aura mon appui, car à titre de députée, elle fait une sacrée bonne job. Reste à savoir si son chef, Jagmeet Singh, saura faire remonter la pente à son parti; selon les derniers sondages, il semble qu’on soit loin de la terre promise!

J’ose espérer que si la tendance se maintient, ma génération propulsera aux postes de pouvoir les citoyens sous-représentés : femmes, personnes racisées, handicapées, trans et tous les autres. Et là, on pourra dire qu’on s’est prévalus de gouvernements majoritairement représentatifs.

Il y a une chose qu’il ne faut jamais oublier; les électeurs votent pour un programme avant de voter pour la diversité. Si une femme – ou une personne disons différente – présente un programme dont les électeurs ne veulent pas, elle ne gagnera pas! Point! C’est ainsi que Rita Johnson a mordu la poussière en Colombie-Britannique, en 1991, et que Kim Campbell a fait de même en 1993, sur la scène fédérale. La première femme à vraiment gagner ses élections – à titre de première ministre – fut Catherine Callback, à l’Ïle-du-Prince-Édouard, en janvier 1993.

Suite à la défaite de Hillary Clinton, face à Donald Trump, chez nos voisins du Sud, en 2016, d’aucuns se demandaient si madame Clinton avait perdu parce qu’elle était une femme.  La réponse est non.  Elle n’a pas perdu parce qu’elle est une femme; elle a perdu parce qu’elle est Hillary Clinton.  Elle a fait sa marque en tant que secrétaire d’état pendant le premier mandat de Barack Obama, et son passé a parlé pour elle.

De retour chez nous, l’une des époques les plus effervescentes, en politique, fut après l’échec de l’Accord du lac Meech; c’est à cette époque que les québécois sont passés à deux cheveux de se donner un pays bien à eux.  À ce moment-là, on aurait pu présenter une perruche pour le PQ qu’elle se serait fait élire!  J’exagère à peine!  Si vous voulez être représentée par un – ou une – personne sous-représentée, c’est simple; votez pour cette personne, et encouragez vos voisins à faire de même.  Voilà!

Mouvement étudiant: Une belle solidarité, pour une cause… perdue d’avance!

Le 22 mars dernier, la ville de Montréal fut témoin d’une manifestation étudiante – une autre – organisée, comme toutes les autres, dans le but de faire reculer le gouvernement de Jean Charest sur le réajustement des frais de scolarité, à concurrence de 325$ par année, pendant 5 ans.

Contrairement aux autres, qui se sont terminées dans le grabuge, et parfois même avec des blessés, celle d’hier fut toute propre!  Pas d’escouade anti-émeute, pas de bisbille, bref, une belle manif.  Les organisateurs avaient donné, aux forces policières, le parcours de la marche, qui a attiré au-delà de 200,000 personnes, selon les porte-parole des organisateurs.  On pourrait se demander pourquoi leurs autres manifestations se sont toutes terminées dans le trouble, mais ça, c’est une autre histoire; les organisations étudiantes nous ont prouvé qu’elles pouvaient mobiliser beaucoup de gens, proprement, et c’est tout à leur honneur.

Mais.  Parce qu’il y a un “mais”.

Le problème, avec le mouvement étudiant, c’est que leur cause est perdue d’avance, et voici pourquoi.

D’abord, sur le fond de leur requête principale, à savoir l’augmentation des frais de scolarité.  Précisons dès le départ que les frais de scolarité, au Québec, sont plus bas que partout ailleurs au Canada, voire même en Amérique du Nord.  Selon cette table, de Statistique Canada, mise à part la province de Terre-Neuve-et-Labrador, dont la moyenne est légèrement supérieure (un peu plus de 200$) à celle du Québec, toutes les provinces ont des frais universitaires plus chers d’au moins 1182$, selon les chiffres révisés pour l’année scolaire 2010-11.  De plus, quand on prend le temps de décortiquer la liste principale, et celle de chaque province, on peut constater que les étudiants québécois sont drôlement privilégiés!  Saviez-vous que même avec l’ajustement de 1625$, un étudiant québécois en médecine paiera 2012$ de moins que la province la moins chère au Canada, à part le Québec?  Voici d’autres exemples.

– Médecine, au Québec, coûtera 4238$ de frais de scolarité, au premier cycle (coût de 2010-11, +1625$), alors qu’en Ontario, il en coûtait 18,400$, en 2010-11!  Comprenez-vous pourquoi les étudiants québécois en Médecine ont tardé à joindre le mouvement?

– Dentisterie coûtait 32,960$ en Saskatchewan, en 2010-11.  Au Québec, cette année-là? 3112$!  C’est moins de 10% des frais de scolarité d’un étudiant saskatchewanais!

– En Ontario, toujours en 2010-11, il en coûtait 8335$ à un étudiant ontarien pour faire Droit.  Un québécois qui faisait Droit devait investir… 2330$!  Même pas 30%!

J’ai calculé les frais universitaires potentiels des étudiants québécois (coût 2010-11 + 1625$), et si toutes les autres provinces gèlent leurs frais (ce qui me surprendrait beaucoup), nos étudiants paieront moins cher que tous les autres canadiens en Droit, Médecine, Dentisterie et Médecine vétérinaire, quatre concentrations parmi les six plus dispendieuses, selon la moyenne canadienne.  Dans toutes les autres concentrations, les québécois se retrouveront parmi les deuxièmes ou troisièmes moins chers au pays!  Autrement dit, le message des étudiants, quand ils veulent se faire passer pour de pauvres misérables, qui crèvent de faim et de froid, est pour le moins mensonger!  Sans aller dans les extrêmes, disons qu’en moyenne, ils ont probablement plus de problèmes de gestion que de problèmes de revenus!

À leur défense, il faut spécifier que la stratégie leur a peut-être été refilée par les centrales syndicales, qui appuient les étudiants, dans leur mouvement.  Nous savons tous que le “manque flagrant de dignité” est la pièce maîtresse de toutes les revendications syndicales, et que cette dignité ne peut se rattraper autrement qu’en mettant de l’argent, encore de l’argent, toujours de l’argent!  Tant et si bien que le contribuable est littéralement saigné de son vivant (Halal ou Kosher, à vous de choisir!) par le gouvernement du Québec qui, depuis une bonne vingtaine d’années, sinon davantage, ne se gêne pas pour “taxer les taxes”!  Malgré cela, autant chez les syndiqués de l’état que chez les étudiants, on en demande toujours plus!

Ensuite, la stratégie, puisqu’il en est question.  Pour convaincre les gens que l’on est tellement pauvre qu’on ne peut pas assumer une augmentation de 325$ par année, il faudrait commencer par faire preuve d’une certaine pauvreté; vos iPhone4S, vos iPad de dernière génération, et vos manteaux à plus de 1000$, gardez-les pour sortir, et habillez-vous au Village des Valeurs, avant de manifester, vous serez peut-être plus convaincants!  Vos manifs – à part la grande manif cute de jeudi – avaient davantage l’air de défouloirs, ou de partys, que de mouvements de revendications!  À mes yeux, ce n’est pas très vendeur!  Quand vous bloquez un pont, ou une artère principale, vous risquez de vous faire plus d’ennemis que de complices!  Si vous voulez que les citoyens – autres que les artistes, les profs, et vos parents – vous soutiennent, il faut les mettre de votre côté, et non pas vous les mettre à dos!

Mais peu importe la stratégie, rien ne sert de pousser la comédie plus loin; le gouvernement a décidé, et il maintiendra sa décision!  Il sait que les élections seront probablement perdues, alors il a le temps pour lui!  Dans les faits, un gouvernement peut rester en poste pendant 5 ans.  Comme les dernières élections générales ont eu lieu le 8 décembre 2008, le premier ministre peut donc attendre jusqu’au 7 décembre 2013 pour rendre visite au lieutenant-gouverneur, et lui demander de dissoudre le gouvernement.  Comme il faut tout de suite oublier le lancement d’une campagne électorale pendant la période de Fêtes, celle-ci serait probablement lancée, disons après le 10 janvier, pour des élections à la mi-février 2014!  Évidemment, tout cela est théorique, et même les libéraux de Jean Charest n’iront pas jusqu’à cette échéance.  Enfin, je ne le crois pas.  Aussi, si le plan de match des étudiants est de suivre l’autobus libéral, pendant la campagne électorale, ils sont mieux de ne pas tout dépenser leur budget de manifestations maintenant!

Santé: Combien faudra-t-il de preuves supplémentaires?

Ce matin, je recherchais des articles sur le décès de Jean-Guy Pitre, ce policier à la retraite, qui était en attente d’une chirurgie cardiaque, et qui est décédé sur la liste d’attente, comme tant d’autres québécois qui subissent le même sort à chaque année.  L’affaire a été rapportée, entre autres, par l’agence QMI, et publiée dans les pages du Journal de Québec.  Mon but était d’écrire un billet sur le sujet, évidemment.  Mais je n’aurai pratiquement pas besoin de le faire, puisque Stéphane Gendron l’a fait, par l’entremise de sa chronique hebdomadaire, publiée dans le Journal de Montréal, et reprise par le site web Canoë.

Gendron s’en prend particulièrement à la réaction du péquiste Bernard Drainville, qu’il qualifie de “déclaration grandiloquente d’un député d’arrière-ban qui a encore des croûtes à manger”.  Remarquez que premièrement, à part ceux qui ont un poste précis, comme le chef ou le leader parlementaire, tous les députés d’opposition sont d’arrière-ban.  Deuxièmement, avec ce que l’on connaît du maire de Huntingdon, avouons qu’il doit sûrement lui-même s’y connaître en déclarations grandiloquentes.  Aussi, contrairement à Stéphane Gendron, je ne m’attarderai pas davantage sur les déclarations du député péquiste, mais sur le problème en tant que tel, à savoir que des patients québécois, et ce en plus grand nombre que ce qu’on nous laisse croire, connaissent le même sort que Jean-Guy Pitre, et meurent sur des listes d’attente.

Jusqu’à un certain point, le ministre en poste – Yves Bolduc – a une certaine part de responsabilité, à mes yeux.  Il devient alors facile de faire comme Bernard Drainville, justement, et se contenter de demander sa démission.  Mais le problème ne se limite pas à la seule tête du ministre; la démission de Bolduc, ni même celle du gouvernement en entier, d’ailleurs, ne ramènera pas Jean-Guy Pitre, et les autres, à la vie.  Parce que l’important, ici, c’est que monsieur Pitre n’est pas le seul à qui c’est arrivé; le gouvernement ne se targuera pas de statistiques à ce sujet, mais des dizaines de patients meurent de complications directes ou indirectes, en attente d’une chirurgie, ou de soins appropriés.  Le problème, c’est qu’il faut faire le ménage, en santé comme ailleurs, dans l’appareil gouvernemental.  Et même si le ministre Bolduc avait une stratégie gagnante, pour y arriver, si le conseil des ministres ne donne pas son aval, il ne se passera rien.

La principale stratégie, à mon avis, et ce autant en santé que dans les autres ministères, passe par le dégraissage de l’appareil gouvernemental.  Mettre moins de budget dans le “poussage de crayons”, et davantage sur le plancher, à savoir dans les salles d’op, dans les urgences, dans le suivi à domicile, bref, partout dans le domaine de la santé.  En fait, le gouvernement devrait se rendre compte qu’il ne possède pas l’expertise, en santé, et qu’il devrait laisser la place à de véritables professionnels, pour se contenter de payer la facture.  J’ai déjà expliqué ce processus sur le Blogue, et je vais le faire à nouveau, encore une fois avec l’exemple de l’assurance-auto.

Imaginez que vous avez une voiture, et qu’elle est assurée.  Un jour, vous avez un accident; que faites-vous?  Vous appelez votre assureur, qui prend le cas en mains; il envoie un estimateur, qui évalue les dommages, puis une fois l’estimation complétée, vous permet de faire effectuer les réparations chez un carrossier de votre choix, du moment que la facture ne dépasse pas celle de l’estimation.  Encore là, il demeure possible d’ajuster la facture totale, si le carrossier découvre des dommages qui n’ont pas été compilés par l’estimateur.  Or, les carrossiers n’appartiennent pas aux compagnies d’assurances; ce sont des entreprises indépendantes, quoique parfois regroupées en bannières, et sont en concurrence, les unes contre les autres.  Est-ce que les réparations d’automobiles accidentées sont toutes merdiques?  Non.  Évidemment, certains carrossiers sont meilleurs que d’autres, c’est vrai.  Mais il est toujours possible d’une part de s’informer auprès de proches, qui ont subi le même sort, afin de comparer le travail des uns et des autres, et d’autre part, de poursuivre un carrossier qui aurait bâclé son travail.

Pourquoi ne ferait-on pas de même avec la santé?  Imaginez que vous n’allez pas; que faites-vous?  Comme vous êtes assuré, vous vous rendez à votre clinique, qui prend votre cas en mains; on procède à un examen complet, et selon ce qu’on découvre, on vous permet de recevoir les soins appropriés, dans un hôpital de votre choix.  Et si l’on découvre autre chose en cours de processus, à la lumière d’autres examens, on pourrait ajuster les traitements en conséquence.  Bref, un traitement et un suivi personnalisé de votre cas.  Alors dites-moi,  pourquoi les cliniques d’urgence et les hôpitaux devraient-ils obligatoirement appartenir au gouvernement?  Toutes ces installations pourraient être indépendantes, en concurrence les unes contre les autres, afin de fournir les meilleurs traitements, au meilleur coût possible.  La médecine étant soumise à un code de déontologie, et à des examens de compétences de ses membres, beaucoup plus sévères que le domaine de la carrosserie, les poursuites seraient réduites à un minimum, et les erreurs beaucoup moins nombreuses que dans le système public actuel, où on les balaie sous le tapis, afin de garder la confiance du public, qui n’a pas les moyens de se payer la concurrence, contrairement à Dany Williams, premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, comme le rapporte ici Radio-Canada.  Et imaginez maintenant que tout ce beau monde accepterait la carte-soleil!  Ce serait le meilleur des deux mondes; des soins professionnels, fournis par les meilleurs de la profession, et le gouvernement continue de payer!  On pourrait même mettre l’assurance gouvernementale en concurrence avec les assureurs privés!  Pourquoi pas?

En somme, qu’est-ce que le gouvernement attend pour permettre la concurrence, dans le domaine de la santé?