Malgré que je ne sois pas toujours en accord avec ses propos, Alain Dubuc, de La Presse, m’a fait franchement plaisir, ce dimanche. Dans son article intitulé « Santé: le tabou« , il exprime un souhait que j’affiche depuis longtemps, à savoir de permettre l’arrivée de la concurrence dans le domaine de la santé.
Il affirme que le fait que Québec ait sacralisé la santé, afin de la mettre à l’abri des contraintes de l’économie et de la logique marchande, constitue une erreur, de laquelle découle deux conséquences. La première, c’est qu’en mettant la santé « dans une bulle, dans un monde à part, on accepte que 10% de nos ressources (NDLR: 10% du PIB, 39% des dépenses publiques québécoises) ne contribuent pas à la création de la richesse« . La seconde, encore plus fondamentale, selon Dubuc, est que l’on condamne, involontairement, le monde de la santé à la stagnation. « On voit maintenant la santé comme une dépense, un coût, une contrainte, une perception renforcée par le fait que le gros du financement provient du secteur public et donc des impôts. On a donc aussi tendance à vouloir combattre la croissance des dépenses en santé, en raison des pressions insupportables que cela exerce sur les ressources disponibles.« , de dire Dubuc.
Aussi, comment expliquer que des dépenses qui augmentent dans d’autres secteurs – comme la culture – ne font grimper personne dans les rideaux, alors que de telles augmentations dans le secteur de la santé exacerbe tout le monde? C’est que la très grande majorité des augmentations de dépenses en santé ne donnent pas les résultats escomptés. Parce que l’on conserve la santé dans un monde à part, dans une bulle, comme le dit Dubuc. Dans un monde à l’abri de la concurrence. Appelons les choses par leur nom; la santé, au Québec, est un monopole syndicalo-étatique auquel il ne faut pas toucher! Pourtant, la concurrence a démontré ses bienfaits nombre de fois, comparativement au monopole, et ce dans tous les domaines. D’autant plus que le fait d’introduire la concurrence en santé n’indique pas qu’il faille renoncer au système de couverture public.
J’utilise souvent l’exemple de l’assurance-automobile – celle pour les dommages matériels – à titre de comparaison pour démontrer que l’accès du privé en santé ne signifie pas la fin de la carte-soleil. Évidemment, personne ne souhaite démolir sa bagnole, mais un jour,… BANG! Que faites-vous alors? Vous appellez votre compagnie d’assurance, qui vous réfère à un estimateur, qui fera le tour du véhicule pour évaluer les dommages. Une fois que celui-ci a produit son rapport à l’assureur, ce dernier vous donne l’autorisation d’aller faire réparer le véhicule chez le carrossier de votre choix. Dans le présent exemple, qui appartient à qui? L’estimateur travaille pour une firme qui n’est pas la propriété de l’assureur. Les carrossiers sont des entrepreneurs indépendants, qui n’ont, eux non plus, aucun lien de propriété avec l’assureur. Celui-ci choisit l’estimateur, d’accord, mais c’est vous qui choisissez le carrossier. S’il y a des dommages que l’estimateur n’a pas vu, votre carrossier les soumettra à votre assureur, qui émettra un paiement supplémentaire, le cas échéant.
Pourquoi ne pas mettre le même système en santé? Imaginez; au moment où vous avez un problème de santé, vous allez dans une clinique, une salle d’urgence, ou encore un CLSC, où le médecin qui vous examine tiendrait le rôle d’estimateur, par rapport à mon exemple. Il communique les résultats à la RAMQ, qui vous autorise à aller dans un hôpital de votre choix, parmi ceux qui dispensent les traitements que votre état requiert. Vous choisissez parmi tous les hôpitaux disponibles celui qui vous convient le mieux selon vos critères. Et c’est la RAMQ qui paie! Ce serait génial, non? Les hôpitaux seraient en concurrence les uns contre les autres, vous offrant le maximum afin de rendre les traitements les moins désagréables possibles.
Évidemment, l’arrivée de la concurence dans le domaine de la santé risquerait de mettre fin à la mainmise des syndicats sur les administrations locales. En fait, pour les centrales, ce serait carrément la fin de la récréation; les administrations privées savent que l’argent est durement gagné à la suite d’efforts, contrairement aux administrations publiques, qui puisent dans les fonds gouvernementaux comme s’ils étaient illimités. C’est pourquoi les centrales syndicales se battent bec et ongles contre l’arrivée du privé en santé; elles savent qu’elles seraient les grandes perdantes, mais n’avoueront jamais que les grands gagnants, ce seraient les patients.
Comme Alain Dubuc, mais pas nécessairement selon les mêmes critères que lui, je crois que la concurrence serait vivement la bienvenue dans le domaine de la santé.