Nous vivons dans une société (distincte?) bien paradoxale. C’est vrai, quoi; autant d’un côté, on voudrait que tout demeure immuable (combien de femmes, et souvent d’hommes, aussi, refusent de vieillir), et en même temps, on veut des changements. Il n’en reste pas moins que l’évolution (dans le bon sens?) fait son petit bonhomme de chemin, parfois même sans que l’on s’en rende vraiment compte.

Image © Vita Magazine
Prenez par exemple la une du magazine Vita du mois de septembre. Elle m’a sauté au visage, la semaine dernière, à l’épicerie. On y voit une Renée-Claude Brazeau resplendissante, avec son petit air espiègle, et à sa droite, c’est écrit « Renée-Claude Brazeau, 44 ans, 4 enfants, 4 pères différents. Vive la galère! » Bon, je veux bien croire qu’elle veut d’abord et avant tout « ploguer » la deuxième saison de son téléroman, qui s’appelle justement, par le plus curieux des hasards, « La galère » (peut-être s’inspire-t-elle carrément de sa propre vie!), mais quand même. Imaginez, il y a vingt ans (ça nous ramène en 1989, non, ce n’est pas assez; mettons plutôt 40 ans), une femme ayant des enfants de pères différents, et pas besoin que ce soit quatre. À Montréal, ça pouvait passer plus ou moins inaperçu, mais mettons le scénario à la campagne, dans un village de moins de 2000 habitants. La dame en question aurait été continuellement pointée du doigt, et reconnue par la population, avec dédain, comme une « Marie-couche-toi-là ». Mais en 2009, vous pouvez faire la une d’un magazine, et c’est OK.
D’entrée de jeu, j’avoue ne pas avoir acheté le magazine, ni lu l’article en question. Par contre, le fait de voir ce titre, sur la une d’un magazine, a allumé ma curiosité. Ben oui, j’ai ça, moi aussi! Je me suis donc mis à la recherche de la façon dont on calcule les pension alimentaires, pour les enfants. Une très courte recherche sur le web m’a amené sur le site du gouvernement du Québec, où je suis tombé sur une table, qui ressemble en tous points à une table d’impôt du bon vieux temps, et qui indique, selon le revenu des parents, la pension alimentaire à laquelle l’enfant a droit (bien que ce soit toujours l’autre parent qui encaisse le chèque). Alors je me suis mis à calculer, avec une question en tête, à savoir si c’est plus payant d’avoir des pères différents, pour ses enfants. Prenons le cas de Renée-Claude Brazeau, par exemple; à moins d’un autre détail d’évolution dont je n’ai pas encore personnellement atteint le niveau, si elle a 4 enfants de 4 pères différents, on peut en conclure qu’il y en a donc au moins trois qui ne sont plus dans le décor, et qu’elle pourrait, en principe, recevoir trois pensions alimentaires distinctes. Il s’agit bien sûr de théorie; je ne connais pas la vie de madame Brazeau, et je ne peux ainsi rien conclure sur sa situation personnelle.
Mais mettons la situation au pire; une femme a 4 enfants, de 4 pères différents, et comme elle a foutu, pour des raisons qui ne sont pas de nos oignons, les 4 bonshommes à la porte, elle reçoit 4 pensions alimentaires. Je vous pose la question suivante: Selon la table de 2009 du gouvernement du Québec, est-il plus payant, pour la mère, de recevoir 4 chèques de pension, pour un enfant chacun, ou de recevoir un seul chèque, dans le cas où les quatre enfants seraient du même père? Bien sûr, la question laisse place à une bonne dose d’interprétation. Après tout, la table est faite en fonction du « revenu disponible des parents ». S’agit-il des deux parents combinés, du revenu du parent payeur, bref, il y a là matière à avocasseries. Mais pour les fins de notre exemple, imaginons qu’il s’agisse du revenu du père, et qu’il verse une pension à la mère. Mettons chacun des pères à 50,000$ par année, afin de faciliter le calcul. Dans le cas des pères différents, les quatre pères auraient à verser une pension annuelle de 6890$, pour leur enfant respectif, ce qui apporterait à la mère une allocation annuelle de 27,560$, qui devra servir pour les enfants, bien sûr. Si les quatre enfants n’ont qu’un seul et unique père, la dame n’aura droit qu’à 15,260$, ce qui lui causera un manque à gagner de 12,300$. Imaginons des pères à 100,000$ par année, maintenant. Avec quatre pères différents, la dame recevrait quatre pensions annuelles de 10,410$, pour un total de 41,640$, alors qu’elle ne touchera que 23,210$ si toute sa progéniture était l’oeuvre d’un seul homme, ce qui la priverait, du coup, de la modique somme de 18,430$.
Évidemment, les différences financières, entre les deux situations, sont énormes; c’est presque du simple au double. Il ne faut pas négliger, par contre, que les pères différents se mettent à plusieurs pour payer. Vous imaginez, maintenant, un revenu annuel de plus de 40,000$ pour rester à la maison avec 4 enfants? À ce prix-là, je lâcherais ma job! Je présume qu’il y a sûrement une part d’impôt à verser, sur de telles sommes, mais quand même, c’est 40,000$ par année. À ce prix-là, mesdames, oubliez l’aide sociale, surtout que lorsque l’on est sur le BS, peu importe la pension exigée du père, la mère ne reçoit que 100$ par mois, soit le revenu excédentaire maximum qui peut s’ajouter à l’aide sociale. Et le reste, que devient-il? Il est probablement déposé dans le compte – en fidéicommis – d’une agence gouvernementale, que le ministre des finances pourra purger, afin de « balancer » son budget, comme il a purgé celui de la SAAQ, puis de la CSST, auparavant.
Mais maintenant que ces données sont connues de tout le monde, observera-t-on une nouvelle tendance? C’est presque une voie d’avenir pour les femmes qui « trippent bébés »! Moins pour les gars, j’avoue. Et après, on se demandera pourquoi les québécois ne veulent plus draguer.
MISE À JOUR – 8 septembre 2009
Vous ne devinerez jamais! J’ai reçu un message privé de nulle autre que Renée-Claude Brazeau, en personne. Je ne vous dirai pas tout, mais elle m’a précisé que pour sa part, la tendance a été plutôt à l’inverse; elle n’a demandé de pension à personne! Elle s’est démerdée toute seule, avec les couches, le travail, et tout. Alors question de « galère », elle en connaît tout un rayon, il n’y a pas l’ombre d’un doute! Elle a fait face à sa situation avec courage, a pris les mesures qu’il faut, et en récolte les fruits, aujourd’hui. Et c’est tout à son honneur.